Yves Paganelli

Article paru en février 2015
Mis en ligne en juillet 2022
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Yves Paganelli est né dans le sud algérien en 1943. À un an et demi, il perd brutalement sa maman, nageuse aux Jeux Olympiques de Berlin en 1936, qui se noie en mer emportée par un courant violent. Son père militaire, meurt en 1953.
Yves Paganelli gagne la France à six ans pour grandir en Ardèche, à Aubenas, auprès de sa grand-mère, qui elle-même a perdu son mari… la veuve élève l'orphelin...

 

« J'avais peur des orages, de tous les morts qui m'entouraient / Mon père, ma mère... Quel naufrage... Et puis grand-mère riait, sa vie parfumée de chansons / Et ses quatre-vingts ans portaient tout seuls mes dix-sept ans / à bout de bras, à bout d'espoir  /... on luttait tous les deux sur un radeau qui prenait l'eau. » (ndlr : extrait de sa chanson « Grand-Mère »).

Malgré les douleurs liées aux deuils et les difficultés matérielles, Yves et sa grand-mère se ménagent un cocon entre eux deux et vivent dans un environnement qu'ils veulent constamment optimiste. L'enfant s'évade dans l'écriture, la grand-mère dans la musique : « C'était une femme formidable, raconte-t-il. Elle est née à Jaujac, mais elle était en décalage avec les mamies du quartier. Elle était couturière à Paris, à la « Belle Époque », elle me chantait des airs d'opéra et me faisait découvrir les grands chanteurs français. À un Noël, elle m'a offert mon premier électrophone, un Teppaz ».
À vingt ans, Yves donne ses premiers spectacles : « Je me suis mis à chanter dans un groupe de copains, pour m'évader et pour avoir le sentiment d'exister, pour rencontrer des filles aussi. Nous étions très amateurs, je chantais Ferrat, Brel, Ferret, Brassens et puis je glissais quelques-uns de mes textes dans les spectacles. » Un jour à Antraïgues, il chante Nuit et Brouillard, puis Potemkine, chansons censurées à l'époque à l'antenne. C'est ainsi que Jean Ferrat qui assiste au spectacle ce soir-là, le remarque. Il reconnaît la qualité de certains de ses textes et décide de le soutenir et de l'introduire dans les cabarets parisiens. Le jeune Paganelli d’alors, veut faire de la chanson. Il rejoint la capitale en 1968. Guy Boulanger, le pianiste de Jean Ferrat, accepte de jouer avec lui et l'accompagne à Paris. Le grand cabaret de la rue Saint-Jacques « Le Port du Salut » l'embauche immédiatement. S'ouvre alors à lui la vie nocturne des cabarets et de la chanson et, ayant parallèlement suivi des études de droit, il devient archiviste le jour. Il est de plus en plus difficile de mener de front ces deux vies, d'autant plus que sa femme et sa fille l'attendent à la maison. Yves Paganelli s'oriente donc vers la confection d'une maquette de disque : un projet de 33 tours avec les musiciens de Ferrat est en sérieuse gestation chez Barclay. Ce dernier ne verra finalement pas le jour, la maison de production étant rachetée par des Anglais. Par le plus grand des hasards,  le directeur des Archives Nationales, où travaille Yves, est le grand écrivain cévenol André Chamson. Une chance pour Yves : « C'est lui qui m'a fait redécouvrir le pays, il me parlait constamment de l'Ardèche. J'ai écrit Jean des Cévennes à Paris, un jour, avant d'aller voir chanter Barbara. »

Bref un Paganelli, élevé par une mamie qui lui chante la capitale, qui fait ses preuves à Paris, où il rencontre un écrivain cévenol qui lui chante l'Ardèche. Et c'est ainsi qu'Yves revient au pays. En août 1976, il s'installe en famille à Chirols, il est professeur d'histoire et géographie au lycée Froment à Aubenas. Il avait déjà été contacté par la première maison de disques ardéchoise « De Plein Vent », installée à Vals-les-Bains. Le titre Jean des Cévennes sort en décembre 1976, La Morte Vive en 1977. Son succès artistique conjugué à ses qualités relationnelles auprès de son village, lui permettent de devenir maire de Chirols en 1977, « par accident ! », s'amuse-t-il à dire, succédant ainsi à l'équipe Plantevin, patron de l'usine de moulinage du même nom.
« Paga », comme le nomment ses amis et les villageois, gérera pendant trente et un ans, une vie communale très active. Il crée notamment une des premières haltes-garderies du département. Sa médiatisation lui ouvre également de nombreuses portes et c'est ainsi que peut être envisagée la création de l'écomusée du moulinage à Chirols. En 1986, le département devient propriétaire de l'usine. Avec le concours d'Yves Morel, spécialiste du moulinage, Yves mène à bien ce projet et l'écomusée est inauguré en 1988. « J'ai toujours essayé de me dissocier de l'image du chanteur régionaliste, explique-t-il. Je ne me suis pas attaché à l'Ardèche par naissance, mais par conviction. Je me suis impliqué dans la vie du pays, j’ai aimé participer à la revalorisation du territoire ».

Après un quart de siècle de tournées en France et en Belgique avec deux ou trois musiciens et un millier de spectacles, depuis trois ou quatre ans, Paga revient sur scène pour chanter seul à la guitare: un tour de chant complet d'une heure trente sans entracte. Il sort un double CD, « Paganelli, tout simplement » rassemblant son œuvre complète. Il a créé également le spectacle « Autour de Marie-Louise », dans lequel il alterne des lectures de son livre et ses chansons. « Marie-Louise », c'est une histoire d'amour entre une petite moulinière et un jeune mécanicien venu de la ville. Ce livre qu'a écrit Yves a été publié en 1998 et adapté dans une fiction documentaire produite par Fabienne Prat. Après avoir chanté son pays, dans « L'Ardèche tout simplement », publié en 1994, écrit « Mystère au Musée » en 2000, où il raconte l'histoire de la création de l'écomusée du moulinage, il retrace sa vie dans « Au-delà des mots et des notes », publié en 2013 chez Septéditions (Ailhon). Un nouveau travail d'écriture, plus personnel, est en préparation, dans lequel l'écrivain met en lumière une confrontation entre l'auteur et les propres personnages de ses différents livres. Paga a soif de rencontres humaines, littéraires et culturelles. Il court les salons du livre, organise des apéritifs littéraires où il lit ses œuvres, enchaîne les spectacles, et continue avec un enthousiasme toujours grandissant, de guider les visiteurs de l'écomusée. Yves Paganelli : « c'est l'Ardèche / où le temps se compte en virages / peu de richesses, le fil de soie est en sommeil /..., c'est l'Ardèche / où la vie porte une autre odeur / seule richesse, le cœur de ceux qui osent encore / vivre en Ardèche » (ndlr : extrait de sa chanson Vivre en Ardèche).
« faut savoir lutter pour que la terre morte vive, faut savoir aimer » (ndlr : extrait de sa chanson de La Morte Vive)

 
Liens
Un site à visiter>>>  www.yves-paganelli.fr
« Paganelli, tout simplement » (double CD de 50 chansons) éditions FOL07.
« Au-delà des mots et des notes, itinéraires d’un Ardéchois vagabond », Yves Paganelli (Sept Éditions / 2013).
 
Texte et clichés : Bruno Auboiron