La Bourse Foncière Forestière

Article paru en juin 2016
Mis en ligne en juillet 2022

La bourse foncière forestière est un tout nouvel outil mis en place depuis quelques mois à peine. Elle favorise le regroupement de parcelles pour une meilleure valorisation des bois par l’échange, la vente et l’achat. Voilà pourquoi il semblerait être à la hauteur des attentes des propriétaires forestiers privés.

Quatre-vingt-dix pour cent de la forêt ardéchoise est privé, dont une très faible proportion fait l’objet d’un plan de gestion contractuel. Cette forêt privée est en forte croissance, passant de deux cent dix mille hectares de superficie, en 1972 à deux cent quatre-vingt-douze mille hectares en 2009, soit vingt-cinq pour cent d’augmentation en à peine quarante ans. Cette superficie augmente encore. "Cette croissance traduit un abandon agricole et donc un passage par la friche, assure Jacques Degenève du CRPF (Centre Régional de la Propriété Forestière) à Aubenas. À long terme, cela peut être une belle opportunité pour notre département car l’espace boisé sera de plus en plus recherché." Certaines communes présentent déjà un taux de boisement de cinquante-cinq pour cent et dans le sud ce taux monte parfois jusqu’à quatre-vingt pour cent. Mais la face cachée de ce boisement abondant est son morcellement foncier : quatre-vingt pour cent de propriétaires possèdent moins de quatre hectares en plusieurs parcelles. Ainsi, notre département compte au minimum cinquante-cinq mille propriétaires forestiers.

"Le premier obstacle à la gestion des parcelles forestières est leur non-accessibilité, poursuit Jacques Degenève. Et donc cela rend notre bois moins attractif pour les professionnels." L’Ardèche ne produit pas de bois exceptionnel, mais des bois d’usage courant pour l’ébénisterie, la menuiserie, la charpente, l'énergie (plaquettes, granulés, bûches…) dans un ordre décroissant de valeur. Seul l’attachement de certains professionnels et scieries au développement du circuit court, joue en faveur de nos bois. Le second obstacle est le morcellement et même si les forestiers du CRPF servent de relais, l’acheteur doit composer avec un panel de propriétaires. Pour lisser cet obstacle, le CRPF, structure qui en est devenue gestionnaire, et le Conseil général ont mis en place la bourse foncière forestière.

Le but de cet outil informatique performant est de faciliter le regroupement des parcelles par l’achat, la vente et l’échange. "Depuis douze ans, nous organisons des réunions sur le terrain puis un suivi trois mois plus tard pour traiter les dossiers individuellement, explique Jacques Degenève. Nous sensibilisons ainsi annuellement environ deux mille propriétaires forestiers. Il est intéressant de faire prendre conscience à un propriétaire qu’un terrain à l’abandon ou oublié a des chances de gagner en valeur s’il le vend ou l’échange. C’est pour le bien de tous." Ainsi au fil du temps, une liste fut établie de biens disponibles à la mobilité. Fort logiquement, l’idée est venue de se servir de cette liste pour constituer le fond de départ de la nouvelle bourse foncière forestière sur l’ensemble du département. D’autant plus que les aides au paiement des frais notariés, accordés par le Conseil général, étaient maintenues dans ce nouveau système. "On devient souvent propriétaire forestier par héritage, poursuit Jacques Degenève. Ce n’est pas toujours un choix et il est intéressant de disposer d’un outil comme la bourse pour valoriser ou se défaire d’un bien dont on n’a que faire."

Souvent l’achat délibéré de parcelles forestières correspond à la volonté d’agrandir son patrimoine et ainsi mieux pouvoir le gérer, produire et vendre du bois d’œuvre, ou de le désenclaver. C’est l’achat de ceux qui aiment voir grandir les arbres, qui investissent sur l’avenir à moyen ou long terme, parfois pour la génération à venir. "Je connais un propriétaire, forestier dans l’âme, qui, en une dizaine d’années, a réussi à agrandir sa propriété de trois à vingt hectares d’un seul tenant, s'émerveille Jacques Degenève. Là, ça commence vraiment à être intéressant pour une bonne gestion." Une autre raison pour acheter des parcelles forestières est de s’assurer son propre approvisionnement en bois de chauffage. Et puis il y a les achats des chasseurs pour leur permettre de chasser dans la commune concernée ; ce sont les actes d’achat les moins intéressants car ils n’ont pas vocation à valoriser la forêt.

Des débuts prometteurs.
Si aucun objectif chiffré ne fût fixé pour l’avenir de la bourse foncière forestière, force est toutefois de reconnaître qu’elle fonctionne très bien. Son fonctionnement est très attractif et les offres sont nombreuses concernant plusieurs centaines d’hectares devenus mobiles et largement réparties sur le territoire. De nouvelles offres remplacent régulièrement celles qui sont retirées suite à un accord entre propriétaires. Toutefois, l’échange a moins la côte que la vente, car la démarche semble plus compliquée… Alors ne doutons pas que la forêt privée ardéchoise va prendre de la valeur et devenir encore plus attractive dans l’avenir !
En savoir plus 
Centre Régional de la Propriété Forestière
Jacques Degenève
10 place Olivier de Serres
07200 Aubenas
04 75 35 40 26
B2F07@cnpf.fr
www.b2f.ardeche.fr
La bourse en quelques chiffres
Depuis l’ouverture du site internet, le 2 novembre 2015, avec 592 lots proposés, 187 réponses ont été enregistrées à des demandes de mise en relation, 118 nouvelles parcelles proposées à la vente par 20 propriétaires particuliers sur 19 communes et 6 nouvelles parcelles proposées à l’échange par l’Office National des Forêts sur une commune. Aujourd’hui 7 ventes sont en cours, 997 parcelles soit 452 hectares sont à la vente et 453 parcelles soit 159 hectares sont à l’échange.
Jacques Degenève a répondu à maintes sollicitations pour des conseils sur la valeur du bois, de la forêt, la viabilité d’un projet et la mise en relation entre des voisins de parcelles. Chaque semaine, une mise à jour du site et de sa gestion a lieu.
Texte et clichés : Bruno Auboiron