Nos plus belles falaises, un secteur d'escalade de haut niveau
"Dans les années quatre-vingt-dix, notre département était en pointe pour l’escalade, grâce notamment à une grande implication politique", explique Guilhem Trouillas, grimpeur professionnel.
D'un point de vue de fréquentation extérieure au département, les grandes voies en dalle qu’offrent les sites magnifiques se dressant au-dessus des rivières Ardèche et Chassezac, n’ont plus la cote et il manque aussi des voies en dévers, munies de grosses prises. Mais l’aménagement et l’équipement de nouvelles voies se trouvent confrontés actuellement à un problème de responsabilité juridique : en effet, qui est responsable en cas d’accident sur le sentier d’accès ou sur la falaise ? Le propriétaire, l’usager ou la fédération sportive ?
"La falaise n’est pas un milieu sportif aseptisé comme un gymnase ou un stade, précise Guilhem Trouillas. C’est un milieu naturel où le risque reste toujours présent." Alors tant que ne sera pas résolu ce problème, la situation de l’escalade en Ardèche ne changera pas. De secteurs de pointe, nos plus belles falaises sont devenues des secteurs de haut niveau, et le resteront.
Faire découvrir la diversité de nos sites
Cela dit, l’Ardèche possède de réels atouts propres à attirer un large public local et extérieur. "Le premier avantage de notre département est la diversité de ses sites, poursuit Guilhem, alliant l’intérêt sportif à la découverte du territoire. Les gorges de l’Ardèche pour le haut niveau pourraient même être un site d’intérêt majeur en Europe."
Les gorges du Chassezac, quant à elles plus modestes, s’adressent à tous, ainsi que le cirque des Gens à Chauzon, surtout fréquenté par les grimpeurs locaux. Et enfin les secteurs des Cévennes et de la vallée du Rhône, offrent des petits sites dignes d’intérêt pour les clubs et les familles.
"L’intérêt d’un site, explique Guilhem Trouillas, se vérifie par la qualité de son rocher, sa compacité, les formes et la variété de ses prises, sa hauteur, son exposition et son accès. Il faudrait aussi que certains secteurs faciles soient mieux équipés pour permettre de débuter dans de bonnes conditions. Il ne s’agit pas d’aseptiser la pratique, mais de la rendre plus accessible au plus grand nombre."
On le comprend, le travail d’équipement et d’entretien ne manque pas, mais étant assuré principalement par des bénévoles, l’évolution de la pratique avance plus vite que la mise à niveau des sites. Et Guilhem Trouillas sait de quoi il parle, puisqu’il fut un temps, président du comité départemental Ardèche de la fédération française de montagne et escalade.
Un engouement local pour l'escalade plutôt positif et une fréquentation en forte augmentation
Il est bien difficile de définir et dresser le portrait type du grimpeur ardéchois. De la famille, au grimpeur de loisir non licencié dans un club, du grimpeur multi activités au grimpeur de point, le panel est large. Quand on compare le nombre de pratiquants au nombre d’habitants du département, on constate que le dynamisme de l’activité est fort. On compte environ mille licenciés répartis dans une dizaine de clubs dont les plus importants sont Aubenas, Les Vans, Le Pouzin-Chomérac, Tournon-sur-Rhône. Quant au nombre de grimpeurs non licenciés, il est bien impossible à chiffrer, mais la fréquentation des sites d’escalade dès qu’un rayon de soleil caresse le rocher prouve qu’il est conséquent. Et ce dynamisme ne faiblira sans doute pas de sitôt, car la formation de nouveaux grimpeurs se développe encore. "Les clubs ont intégré des moniteurs diplômés pour assurer la formation, se félicite Guilhem Trouillas. Ainsi, aux Vans, de huit enfants en 2008, ils sont maintenant quatre-vingt cette année." Former des grimpeurs, c’est bien, mais pour quelle pratique ? Du sport en salle sur des structures artificielles imitant grossièrement le rocher ou un sport de nature ? "Très clairement c’est l’image activité de nature qui attire les nouveaux pratiquants, poursuit-il. La compétition reste anecdotique, mais cela évoluera sans doute dans l’avenir."
Guilhem Trouillas est peut-être l’exemple du grimpeur type que nous cherchons. Grimpeur avant tout, il est aussi pratiquant pluriactivité. Il est "tombé tout petit dans la marmite" des sports de nature. À part une parenthèse dans le monde du handball à haut niveau, il s’est forgé au contact de la nature. Il s’adonnait aux joies de la pêche à la mouche et a suivi une formation professionnelle de gestion des espaces naturels avant de revenir en Ardèche et oser vivre de sa passion, il y a huit ans. Mais rien n’est vraiment simple, car la saisonnalité marque fortement l’activité. Guilhem Trouillas a pourtant trouvé la bonne formule. "En créant ma propre structure, j’ai réussi à vivre majoritairement de l’escalade toute l’année, mais le canyonning reste l’activité de pointe. Et de cinq à soixante-dix ans en individuel ou en club d’ici ou d’ailleurs, les gens viennent de partout en France et même de Belgique, de Suisse." Cerise sur le gâteau, il travaille principalement dans le département sans jamais se refuser un petit tour vers d’autres rochers. Les gorges du Verdon et de la Jonte, le massif du Caroux et Saint-Guilhem-le-Désert ont ses faveurs et il rêve de Jordanie avec les paysages désertiques des falaises du Wadi Rum… "Je veux transmettre ce que l’on m’a transmis, conclut-il. J'affirme aussi que le grimpeur est quelqu’un de responsable avec un esprit sain et désireux d’apprendre la nature. Le grimpeur est respectueux de cette nature et des autres..."