Karen Boiron marionnetiste

Article paru en novembre 2016
Mis en ligne en juillet 2022

Karen Boiron donne vie à un monde en minuscule pour un art en majuscule. Ses mains, sa voix, son imaginaire donnent la vie à des personnages de papier et de tissus, à des histoires pour les petits et les grands. Karen est marionnettiste.
 

Karen Boiron vit tout à la fois dans le réel et dans son monde imaginaire où elle aime tisser des histoires avec des mots, où elle rend vivant et attachant des petits personnages qui s’animent entre ses mains.
Cette artiste foisonne d’idées et de projets que sa persévérance, sa patience et son charisme parviennent à façonner à ses envies. Comme Paulo Coelho, elle assure que « Quand on veut vraiment quelque chose, on y arrive ! » L’optimisme chevillé au cœur, Karen travaille et travaille encore en compagnie de ses petits personnages évoluant dans son castelet. L’histoire de la marionnettiste de Pont-d’Aubenas a débuté en beaucoup de points, comme un conte de fée …
Ce fut d’abord une rencontre dans le studio d’une radio locale ; Karen après avoir interviewé la marionnettiste Jeannie Ladet, manifesta l’envie d’assister à quelques-uns de ses spectacles, avant de la rejoindre et d’apprendre à son tour, l’art de la manipulation des petits personnages, ayant compris que le virus l’avait à son tour, atteinte. Ce n’est pas tout ! C’est une seconde rencontre qui appuya définitivement ses motivations, celle qu’elle eut avec André Van Erpt, ancien marionnettiste installé à Thueyts, qui légua à notre toute jeune artiste sa centaine de marionnettes, l’ensemble des textes de ses spectacles et surtout son immense savoir dans ce domaine, de la réalisation des pièces à la conception et la construction des marionnettes en passant par la mise en vie du castelet. Deux rencontres déterminantes qui lui apportent de plus en plus de bonheur, auprès de ses marionnettes, chaque jour.

Et c’est tout récemment qu’elle a créé son association, en avril dernier, « Le monde est petit chez Émile », en hommage à son grand-père peintre et sculpteur. Elle s’est tout de suite entourée de musiciens, couturière et tant d’autres, qu’elle ne remerciera jamais assez, nous a-t-elle confié, et qui ont participé gracieusement à la construction du castelet et la mise en place de tout ce qui fut nécessaire au premier spectacle. Ce fut une belle aventure.
« Il y a longtemps maintenant que je travaille à la manipulation des marionnettes, nous lance-t-elle. Avant je pratiquais le théâtre. Au début, j’ai tâtonné, beaucoup écouté, beaucoup appris de celles et ceux qui m’entouraient ou que je rencontrais. Aujourd’hui, je suis plus sûre de moi, je travaille un peu différemment.  J’enregistre les bandes sons de mes spectacles avec de vrais comédiens, j’écris et conçois mes spectacles en collaboration avec d’autres artistes comme Édy l’Alchimiste, par exemple. »

Le théâtre de marionnettes à gaines de Karen conserve l’esprit populaire des castelets d’autrefois avec pendant le spectacle des échanges avec le jeune public, ou le moins jeune lorsqu’il ose… La cloche sonne, annonçant le début du « pestacle », la magie opère. « J’essaie de rester le plus simple possible, mais jamais simpliste. J’essaie aussi par de belles histoires, de montrer aux enfants qu’il existe autre chose que le virtuel. J’en suis presque arrivée à me dire que la vie était mieux avant, nous a chuchoté Karen. » Sa plus belle récompense est le regard et le sourire des enfants quand, à la fin de la représentation, elle passe devant le castelet pour échanger avec les spectateurs. « J’aime voir les étoiles qu’ils ont dans les yeux, à ce moment-là.»

Karen aimerait vivre de son art ; elle est passée d’un travail à temps plein à un mi-temps pour se laisser le temps de répéter, de progresser. Elle est toujours à l’affût de tous les conseils et de toutes les rencontres qui l’emmènent vers une plus grande maîtrise de son art, du spectacle. Elle travaille sur elle-même, face à un miroir, les attitudes de ses personnages. Son expérience du théâtre lui est alors essentielle, elle filme ses répétitions pour vérifier les positions et les déplacements de ses personnages, leur justesse par rapport à la bande son. Puis, dans les derniers moments, elle organise quelques répétitions ouvertes au public dans son garage à Pont-d’Aubenas pour tester les réactions du jeune public et… celles des parents, aussi.

Elle est seule derrière le castelet, elle n’a que deux mains et une voix, alors elle joue ses spectacles sur une bande son, ce qui pourrait éventuellement nuire à la spontanéité de l’ensemble, mais c’est sans compter sur le professionnalisme de Karen. « Je connais la réaction des enfants par rapport au déroulement de l’histoire, alors je laisse des blancs sur la bande son afin qu’ils puissent réagir, interpeller les marionnettes, et même éclater de rire, assure Karen. Ce serait sans doute mieux à deux, une voix d’homme peut-être. Oui, parce qu’à terme j’aimerais travailler à deux. »
À l’avenir Karen souhaiterait aussi disposer de son propre théâtre, une petite salle, afin de proposer des rendez-vous réguliers avec ses marionnettes, produire pourquoi pas, des spectacles d’autres artistes. Disposer d’un castelet itinérant comme aujourd’hui pour aller à la rencontre du public et d’un théâtre sédentaire pour le faire venir à elle, et surtout à ses marionnettes. Voilà son rêve ! « Ce qui me manque le plus aujourd’hui, c’est sans doute un brin d’audace et aussi un petit soutien. Mais tout cela viendra avec le temps. Il faut laisser le temps faire. Je ne souhaite trop bousculer les choses.» Oui c’est certain, tout vient à point à qui sait attendre. Et Karen sait attendre, tout en attirant à elle !
Karen propose en ce moment trois spectacles de trente minutes
Le petit chaperon rouge (2 à 7 ans)
La fabuleuse histoire de Pipo et Aldo (7 à 99 ans)
Un bébé pour Noël (2 à 99 ans)

Des marionnettes différentes
Parmi toutes les variétés différentes de marionnettes qui existent, cet art étant déjà présent dans l’Antiquité, on en distingue trois principales.
Marionnette à fils : c’est sans doute la plus connue. Elle est mise en mouvement grâce à un ensemble de fils, de sept à plus de soixante, reliés aux articulations du pantin. Le manipulateur, se tenant au-dessus, caché ou non, peut lui donner vie horizontalement et verticalement de façon très réaliste.
Marionnette à gaine -les marionnettes de Karen- : la marionnette est enfilée sur la main du manipulateur comme le serait un gant, des doigts pour la tête, d’autres pour les bras. Elle évolue dans un castelet qui permet de ne montrer que le haut de son corps. Ce dernier est comme un sac ouvert cachant le bras du manipulateur.
Marionnette à tiges : elle se compose d’une tête plantée sur un bâton et les mains et les bras sont animés par des tiges rigides. Ce type d’animation de marionnette est plus restrictif.
Texte : Bruno Auboiron
Clichés : Rémi Veau et Max Ladet