Tauriers

Article paru en octobre 2016
Mis en ligne en juillet 2022

Tout comme Chassiers, de l’autre côté de la vallée, Tauriers se dresse sur les hauteurs de la rive droite de la rivière Ligne, telle une citadelle. Nous vous invitons à prendre le temps de monter jusqu’au village avec nous.

Si le donjon de son ancien château marque le paysage de son empreinte et se fait largement remarquer, le petit village à ses pieds, reste quant à lui, fort discret.  Bien peu d’activité rythme ses journées. Il n’y a plus de commerces et les maisons semblent sommeiller entre leurs murs de pierres taillées.

Ce village s’étire au sommet d’un éperon rocheux dominant la vallée de la Ligne, à seulement quelques kilomètres de Largentière. En prenant bien le temps d’observer les vieilles pierres de grès, on remarque qu'il se divise en deux parties bien distinctes ; la partie basse, dite moderne et la partie haute.
Cette dernière correspond à l’ancien bourg castral dont l’enceinte est partiellement visible entre les façades des maisons. À l’entrée de la rue menant à l’église, on franchit une porte à double système de défense, une herse et un assommoir… Certes, son usage n’est plus d’actualité, mais cette caractéristique architecturale donne ce petit air médiéval à l’ensemble qui nous plaît tant.
La petite rue monte jusqu’à une petite place précédée de l’ancienne cure, si on en croit les trois niches creusées dans la façade qui devaient recevoir des statues. Sur la gauche se dresse l’église de style roman Saint-Julien-de-Brioude, érigée au XIXe siècle et qui a été restaurée depuis ; deux vitraux contemporains ornent ses ouvertures. Sur le côté un escalier nous mène entre l’église et la partie résidentielle du château, jusqu’au clocher. De là, la vue s’étend jusqu'au mont Ventoux et jusqu'aux Alpes. C’est aussi le seul point où l'on peut remarquer la partie moderne du château de Tauriers.

Son château féodal
Au sommet du village, dominant le bourg de toute son imposante silhouette, le château est bâti sur une éminence rocheuse. Depuis 1926, il est classé Monuments Historiques. Propriété privée, il ne se visite pas, mais il est permis de l’admirer depuis l’extérieur... et de laisser vagabonder notre imagination.
Le château de Tauriers fut certainement l’un des plus importants du Vivarais. Construit au Xe ou XIIe ou tout début du XIIIe siècle, il apparaît dans les échanges, parfois vifs, entre les comtes de Toulouse et les évêques de Viviers. En 1210, ces derniers se plaignent de nombreuses acquisitions réalisées par le comte de Toulouse dans leur fief, comme ce fut le cas pour le château de Tauriers.
Le château se présente sous l'aspect d’un plan en L, composé d’un donjon à éperon, une curiosité locale, et de deux corps de logis, auxquels s’ajoutent encore plusieurs cours et enceintes.
C’est par une porte charretière coiffée d’un arc plein cintre, que l’on accède au château, pour arriver au pied du donjon. Celui-ci aux pierres admirablement appareillées ne possède pratiquement pas d'ouverture et comporte quatre niveaux composés d’une simple pièce voûtée chacun.
À la fin du Moyen Âge, le château est très largement remanié, pour devenir plus résidentiel que défensif. Un corps de logis à deux niveaux est bâti, et de larges fenêtres apportent une généreuse lumière qui en était jusque-là privé. Et fort curieusement, si la fonction résidentielle est privilégiée, l’aspect défensif est toujours présent : une nouvelle enceinte est élevée et des mâchicoulis sont ajoutés au donjon. Mais pour quelles les raisons ?

Une autre curiosité architecturale, malheureusement en ruine. Il s’agit de la chapelle Notre-Dame-de-Tous-Biens, nommée aussi la chapelle des Trois-Clochers, érigée, en 1875 au sommet d’une colline. "Avant le XIIe siècle, des mines d’argent sont actives dans le secteur de Tauriers. Des prospections récentes laissent supposer que celles-ci étaient situées dans les quartiers de La Madeleine et du Mas Saint-Esprit, au sud-est du bourg. Le lien éventuel de ces mines avec le château reste à établir." écrivait Pierre-Yves Laffont dans son Atlas des châteaux du Vivarais du Xe au XIIIe siècle.
Sur Largentière, l'activité minière dont sont extraits plomb, zinc, et argent a été exploitée jusqu'en 1982. La polyculture vivrière et l’élevage des vers à soie ont longtemps fait vivre la campagne autour de Tauriers. On surnommait les habitants de Tauriers les " sarpe-bruges" en référence à la fougère (bruges) qu’ils coupaient (sarper) pour fabriquer des arceaux afin que les vers à soie puissent fixer leurs cocons…

Jusqu’à la Révolution française, Tauriers était un quartier de Chassiers. Elle devint sous la Révolution, la républicaine "Fanzove". Le 1er décembre 1974, elle perd son indépendance, elle est détachée de Largentière et devient un hameau de Largentière. Et le 1er janvier 1989, Tauriers redevient une commune à part entière.
Mais rassurons-nous, le château et son donjon restent en place, pour des siècles encore…
 
Texte et clichés : Bruno Auboiron