Saint-Cirgues-en-Montagne

Article paru en octobre 2014
Mis en ligne en juillet 2022

Au coeur d’un environnement montagnard affirmé, cette commune vit au rythme des saisons teintant le paysage de blanc, de vert et des couleurs flamboyantes de l’automne.
 

L’origine de Saint-Cirgues-en-Montagne se trouverait sur la colline dont le sommet accueille le château des Éperviers. Là, au nord de la commune, au confluent de la Loire et de la Vernason, devait se dresser un oppidum. Il ne reste aucune trace du village primitif, si ce n’est un vaste emplacement herbeux ponctué de pierres qui auraient été utilisées pour attacher les bêtes lors des foires. Le château et la chapelle Saint-Jean sont eux aussi en ruines. Aucun témoignage, aucune trace écrite ne justifie le déplacement du village sur son lieu actuel entre la Vernason et le ruisseau de Mazan.

Au Moyen Age le village se trouvait placé sur l’important chemin de pèlerinage de la Vierge Noire du Puy-en-Velay. La vie sur ses places et au fil de ses rues était alors intense et l’activité économique basée sur la société rurale et l’artisanat, florissante. Les foires et les marchés étaient prospères jusqu’au moment où la liaison entre la vallée du Rhône et le Massif Central fut ouverte par le col de la Chavade et en amont la célèbre auberge de Peyrebelle. Moins de passage au cœur du village générant moins d’activité et donc les foires et les marchés perdirent de leur éclat pour ne devenir pas plus que des rendez-vous locaux. Le marché hebdomadaire du dimanche accueille les producteurs locaux sur la place du Breuil et le 16 août. Quant à la très attendue foire aux champignons, elle se déroule chaque année au mois d’octobre.
La chapelle romane du village fut bâtie au XIIe siècle. Les offices étaient initialement célébrés par les moines du prieuré de Goudet puis ceux de l’abbaye de Saint-Chaffre du Monastier-sur-Gazeille. Pour accompagner la courbe ascendante de la population et les modes architecturales, elle fut agrandie et remaniée au fil des siècles. Seule l’abside en pierre volcanique ornée de modillons représentant sans doute les signes du zodiaque, témoigne de l’origine romane de ce bel édifice. Une pierre datée de la période préromane est même classée Monument Historique. Elle proviendrait d’une église plus ancienne. À l’opposée du temps, les vitraux contemporains de Louis-René Petit furent conçus en dalles de verre et réalisés par les moines de l’atelier de Saint-Benoît-sur-Loire. À l’extérieur le clocher à peigne à trois arcades accueille encore ses cloches et domine magnifiquement le village. Un peu plus loin, les anciennes maisons en berceau agrémentent la place du Breuil. Des photos anciennes se souviennent de l’ancienne halle couverte. Comme partout la modernité a façonné le village, mais ici une certaine authenticité a su perdurer. Le tunnel du Roux en est un bon exemple. Long de plus de trois kilomètres, ce tunnel aurait du être ferroviaire, pièce essentielle de la ligne imaginée entre Le-Puy-en-Velay et Aubenas. Les ravages de la Première Guerre mondiale ont eu raison de ce projet, dont il existe maints viaducs et tunnels délaissés. Alors le tunnel du Roux est devenu routier et il offre la possibilité aux habitants du village de gagner plus vite le piémont cévenol par Montpezat-sur-Bauzon. Et la gare de Saint-Cirgues-en-Montagne n’a jamais vu le jour au lieu-dit la Plateforme…

Saint-Cirgues-en-Montagne doit aussi beaucoup à son climat estival, son environnement de qualité et sa nature généreuse. Ces atouts ont toujours attiré des citadins venant de Marseille et d’Avignon, entre autres, prendre le frais, et respiré le bon air en montagne. Il faut reconnaître qu’ici la nature sait se montrer sous son meilleur visage. Les nombreux ruisseaux dévalant les pentes boisées ou herbeuses regorgent de truites et d’écrevisses. Dans les endroits où les prairies cèdent le pas aux genêts et à la lande, les chevreuils et les sangliers s’épanouissent. En suivant les sentiers de randonnée balisés, on découvre des richesses insoupçonnées de la faune et la flore. De quoi passer une excellente journée avant de revenir pour une pause bien méritée à la terrasse d’un café de Saint-Cirgues-en-Montagne.


 
Étymologie
En Ardèche, deux communes portent le nom de Saint-Cirgues. Il s’agit bien sûr de Saint-Cirgues-en-Montagne et Saint-Cirgues-de-Prades. Mais ce saint n’existe pas sous cette appellation. Ce nom fait alors référence, en contraction, à Saint-Cyr le Syrien, martyrisé à Tarse en Cilicie vers l’an 230 de notre ère. Des moines d’Orient ont ramené ses reliques à Rome puis dans toute la chrétienté… Derrière la porte principale de l’église du village sont évoqués la vie et le calvaire de ce saint.
Pendant la période révolutionnaire, ce village fut rebaptisé Bauzon-Luc et Bauzon-en-Montagne, car il est implanté au pied du suc de Bauzon.
 
Un prêtre savant
À proximité de l’église, un panneau sur la porte d’une maison évoque le lieu où naquit Auguste-Jean-Baptiste Tauleigne, dit abbé Tauleigne. Né d’une importante fratrie d’une famille paysanne, le 7 avril 1870, il montra très tôt des aptitudes pour les sciences physiques au cours des études suivies au petit séminaire d’Aubenas. L’histoire raconte qu’à treize ans il fabriqua un appareil photographique à l’aide de matériaux rudimentaires et qu’un an plus tard, toujours avec des matériaux de récupération, il démontra les principes de l’électrochimie. Il fut ordonné prêtre en 1899 et devint professeur de sciences puis curé de Pontigny dans l’Yonne jusqu’à sa mort. Jamais sa passion pour l’expérimentation ne se démentit. Il ne possédait pas de laboratoire, tout son environnement en était un. Avec des moyens de fortune, il parvint à donner naissance à des inventions originales en télégraphie sans fil, en optique avec un appareil de projection, en acoustique avec haut-parleur et phonographe, en photographie et radiographie. Ce sont ses travaux sur les rayons x qui lui furent fatals et empoisonnèrent les dix dernières années de sa vie.
 
Texte et clichés : Bruno Auboiron