La porte orientale d’Aubenas.
Si certains villages, comme Vogüé, Balazuc ou encore Pont-de-Labeaume, épousent intimement les courbes de la rivière dessinant leurs bourgs, Saint-Didier-sous-Aubenas semble ignorer l’Ardèche. Sous la domination des falaises blanches du plateau de Jastres, le village regarde plutôt vers la route.
Toutefois, au bout et sous l’imposant pont jaune, coule l’Ardèche. Qui ne connaît pas le Pont de Ville, reconnaissable entre mille ? Franchissant élégamment la rivière, il permet à la route arrivant de la vallée du Rhône de pénétrer le bassin albenassien. Oui, Saint-Didier-sous-Aubenas est la porte d’entrée orientale d’Aubenas. Mais il n’en a pas toujours été ainsi. Jusqu’au début du XIXe siècle, le village était un cul de sac ; point de pont pour franchir l’Ardèche, à peine un gué qui n’était empruntable, en tout cas, pas en toute saison. La route de la vallée du Rhône passait par l’Échelette et Pont-d'Aubenas. Treize années furent nécessaires pour la construction d’un premier pont en bois où fut installé un péage afin d'en couvrir les frais… Le second pont à câbles fut achevé en 1936, après deux années de travaux. Mais en 1993, les câbles donnèrent des signes inquiétants de faiblesse, justifiant la présence de l’arche métallique. L’ensemble de l’ouvrage fut repensé pour offrir le pont actuel, inauguré le 10 juillet 1995. Déjà plus de vingt ans de bons services !
Se développant en perpendiculaire d’une boucle de l’Ardèche, Saint-Didier-sous-Aubenas est la quatrième plus petite commune du département en superficie. Longtemps elle fut considérée comme l’un des greniers de sa ville voisine, Aubenas. Les terres fertiles de la plaine en rive droite de la rivière connurent le développement de grandes et prospères fermes. D’ailleurs, les habitants du village furent longtemps nommés les « planards », en référence aux quelques deux cents hectares d'une magnifique plaine, comme une respiration sur une terre tourmentée.
L’origine de Saint-Didier-sous-Aubenas remonte à une charte de 1084. Le village de développa sous l’influence des abbesses de Lavilledieu. Pendant la guerre de cent ans, famines, épidémies et exactions sévirent et causèrent localement de véritables tragédies. Le temps passant, de paroisse ce n’est que le 24 janvier 1790 que Saint-Didier-sous-Aubenas fut déclarée sous le statut de commune indépendante. Elle prit un temps le nom de Jastres, jusqu’en 1818. Un vieux cimetière et une première église étaient déjà présents en rive droite de l’Ardèche, à l’époque de la domination de l’empire romain. L’emplacement d’une seconde église se perd dans les murs des maisons actuelles et les bouleversements d’un village en constante évolution. Il existait même un abri pour les pèlerins. Cette église disparut lors des guerres de religion ; une grande salle voûtée servait de lieu de culte pour les catholiques en attendant la construction d’un nouvel édifice qui tomba en ruine après la révolution. En 1822 fut prise la décision de construire une nouvelle église, celle d’aujourd’hui et dont le clocher ne fut érigé qu’en 1902.
Impossible d’évoquer l’histoire de Saint-Didier-sous-Aubenas sans évoquer la présence du café Saunier. Il était le lieu de ralliement de la jeunesse locale à la sortie de la seconde guerre mondiale ; jeu de boules, jeu de cartes, les distractions ne manquaient pas quand les jeunes revenaient de la rivière ou descendaient du rocher de Jastres. Les plus anciens du village se souviennent encore des bouteilles de vin frais posées sur les tables, des verres entrechoqués pour trinquer à la santé de tout ce qui valait la peine d’être fêté ou…"arrosé". Marie, la tenancière et femme d’Auguste Saunier qui deviendra maire du village, était réputée bonne cuisinière et femme aimable. Ce café fut vraiment le cœur du village : toutes les affaires locales y étaient discutées, réglées. Mais hélas, un jour, les portes du café Saunier ont fermé pour toujours.
Dominant le village, l’imposante falaise de Jastres était une source inépuisable de chênes coupés pour faire des fagots pour l’hiver. À présent elle sert juste de décor au village. Cet élégant trait horizontal de calcaire blanc est percé par la Baume Chambrière, les grottes de la Soie et du Figuier et rayé par la rude montée de la draille du Pas du Renard qui permet d’en atteindre le sommet près de l’oppidum. On dit même que là-haut, au Pas du Renard, chaque année des habitants de la commune allaient peindre en blanc un rocher que le soleil éclairait à midi. Quand l’horloge faisait défaut, l’heure du soleil était toujours appréciée. C’est sans doute depuis cette draille millénaire que la vue est la plus belle sur Saint-Didier-sous-Aubenas et sa plaine autrefois si fertile.
Allez un petit effort, mais soyez prudents !