Nous ne conterons pas ici ses aventures, qu'il a lui-même écrites dans un célèbre roman autobiographique. C'est plutôt à Lanas que nous avons extrait du creuset de son enfance quelques souvenirs et anecdotes qui n'ont jamais été écrits. Rappelons simplement l'étonnant parcours du célèbre bagnard réhabilité. Henri Charrière dit "papillon" est né en 1906 à St Etienne-de-Lugdares, où l'on peut voir sa maison natale. Sa mère, Marie-Louise, institutrice du village, est nommée en 1909, avec son époux également enseignant, à Pont d'Ucel, là où Henri va grandir avec ses deux sœurs.
A 19 ans il s'engage dans la marine, affecté au régiment disciplinaire de Calvi (Corse). C'est là qu'il se fait tatouer sur la poitrine, à la base du cou, un papillon qui lui vaudra son pseudonyme. Il parvient à quitter la vie militaire en se mutilant le pouce gauche et revient à Pont d'Ucel, où Il devient membre de l'équipe de Rugby d'Aubenas. L'année suivante il part pour Paris, poussé par son besoin d'aventures. D'abord garçon de café à Pigalle, il fréquente là pègre et glisse dans la délinquance. Le 26 mars 1930 son ami Roland Legrand, un souteneur, est retrouvé dans une rue chaude de Montmartre, atteint d'une balle de révolver dans le ventre. Transféré à l'hôpital Lariboisière, le blessé avant de mourir révèle aux policiers le nom du tireur : Papillon.
Henri Charrière, connu du milieu sous le nom de "papillon le pouce-coupé" est arrêté pour homicide. Papillon, au cours de deux procès discutables, plaide en vain son innocence, il est condamné aux travaux forcés et incarcéré au bagne de Cayenne. Il s'évade deux fois ; la première fois, quarante-trois jours seulement après son arrivée, au centre de détention. Mais il est arrêté en Colombie où il est remis aux autorités Françaises. De retour au pénitencier il est placé deux ans dans "la cage" où l'on mate habituellement les plus récalcitrants. Après 13 ans de détention et de multiples tentatives il s'évade, en compagnie de quatre autres détenus, en traversant les marécages et atteint le Venezuela en 1945. C'est dans ce pays, à Caracas, qu'il va rencontrer Rita, tenancière d'un hôtel qui restera auprès de lui jusqu'à la fin de sa vie. En 1956 il devient légalement citoyen Vénézuélien. Bénéficiant d'un passeport et d'une nouvelle nationalité, il revient en Europe, dans le sud de l'Espagne où résident ses sœurs. Puis il repart s'installer au Venezuela, où il devient un honorable homme d'affaire, d'abord directeur d'une pêcherie puis restaurateur.
Bénéficiant du régime de la prescription, il rentre en France en 1967. Il a 61 ans. Le 5 décembre 1970, il adresse une correspondance au maire de St Etienne-de-Lugdarès, afin de solliciter une copie d'acte d'état civil. Il précise alors qu'il demeure à Paris et "a été gracié de son interdiction de séjour en 1970 ".
Le récit de ses aventures écrites en trois mois, rapportées sur 13 cahiers d'écoliers, deviennent 700 pages d'un livre à succès, vendu à près de trois millions d'exemplaires en France, et dix millions d'exemplaires à l'étranger. Il y décrit en détail ses aventures rocambolesques : Le bagne - La fuite dans les marais - La vie primitive avec les indiens Guajiros dans la forêt amazonienne, etc. Il confirmera également dans ses écrits, son innocence en ce qui concerne le crime de Roland Legrand pour lequel il a été injustement condamné. La célébrité lui ouvre les portes de la jet-set et du show-biz. Il multiplie les interviews et les émissions de télé où il rencontre et sympathise avec Sylvie Vartan, Johnny Halliday, Françoise Hardy, etc. Son livre est adapté au cinéma dans un film de Franklin J Schaffner : "Papillon" dans lequel il sert de conseiller technique pour la vedette Steve Mc Queen qui incarne son propre rôle et Dustin Hoffman. Mais ce film sortira le lendemain de sa mort !
Il fait deux séjours en Ardèche, d'abord à Pont d'Ucel et ensuite à Lanas, afin de venir se ressourcer sur les lieux de son enfance, puis repart en Espagne où il meurt d'un cancer, le 29 juillet 1973, à l'âge de 67 ans. Selon son désir, Henri Charrière sera inhumé près de sa mère et de sa tante, dans le petit cimetière de Lanas, la commune d'Ardèche où l'enfant rebelle, le tendre voyou, audacieux et généreux a probablement vécu les jours les plus heureux de son existence.