Le château des Roure

Article paru en septembre 2014
Mis en ligne en juillet 2022

A moins de 10 km de Vallon Pont d’Arc, sur la route de Barjac, les ruelles étroites du petit village de La Bastide-de-Virac enserrent une magnifique demeure du XVe siècle, le château des Roure.
 

Visite du château
Cet édifice vaut autant par son histoire que par l’intérêt pédagogique qu’il offre aux visiteurs. Au-delà des péripéties moyenâgeuses, deux volets socio-historiques sont présentés aux promeneurs : d'une part, une exposition dédiée à la sériciculture, fleuron de l'économie ardéchoise jusqu'à la première moitié du XIXe siècle, et, d'autre part, une approche en demi-teinte des persécutions huguenotes sous la royauté.
Mais la réhabilitation de ce château, ouvert au public, en 1973, est avant tout une aventure humaine pour laquelle   l'Association des Amis du château des Roure œuvre sans relâche depuis cette période. Avec ses murs épais, ses puissants barreaux de fenêtres et ses échauguettes, le château des Roure apparaît d’abord comme une citadelle militaire bâtie sur les bords de l’Ardèche. Pourtant, le siècle de Louis XIII, avec l'apparition de la poudre noire mettant fin à la féodalité, obligea le seigneur du Roure à faire allégeance au roi, le contraignant à abaisser ses défenses sous la menace des canons du souverain. Diminuant les tours et abaissant le toit, devenu le « toit de l’infamie », il affaiblit considérablement le château. Restauré cependant aujourd’hui, il nous apparaît bien plus qu’une simple bâtisse féodale. Ce monument est avant tout une superbe demeure familiale dont le cadre rappelle avec élégance le XVIIe siècle.
Le premier étage renferme une curieuse « école de sériciculture » permettant de mieux comprendre l’élevage du ver à soie. Ces bestioles remuantes, longues comme le doigt, semblent tout droit sortir d'un dessin animé de Franklin destiné à enchanter les enfants. Grâce à une présentation pédagogique ludique, les visiteurs peuvent suivre la naissance du fil de soie, du cocon jusqu’au tissage. Les commentaires, hélas, enregistrés, sont heureusement complétés d'une vidéo attractive. L'accent est mis sur la production et le tissage de la soie justifiant ainsi le cadre économique authentique de la fin du XIXe siècle où l'Ardèche était le troisième département de France en matière de production des précieux cocons. Cette industrie florissante fut pour beaucoup développée par les Protestants qui trouvèrent en terre d'Ardèche un refuge dans des Bastides où ils purent, pour certains, échapper aux dragonnades. Ces gens à l’esprit éclairé ne se sont pas limités aux échanges commerciaux. Ils ont considérablement amélioré les techniques du tissage initialement importées par les Maures. Les premiers métiers mécaniques à pied et à main permettaient de fournir des quantités importantes de soie vendues à Lyon.
Dans les diverses salles du château, des mannequins costumés illustrent avec intérêt le style de l’époque. Revêtus d’habits austères, propres aux huguenots, ces personnages exposent judicieusement le travail de la soie. Des commentaires plus graves relatent les conditions dans lesquelles les réformés, persécutés par l'ancien régime, étaient contraints de se cacher pour lire la Bible, secrètement… la nuit.

L’Association des Amis du château des Roure
De-ci, de-là, quelques objets hétéroclites viennent bousculer le décor traditionnel captivant l’attention de par leur originalité, tels les fers des galériens ou d’authentiques assignats édités sous la Révolution. Dans une tour meublée selon un style très XVIIe, la représentation du duc de Rohan vient rappeler la sombre période des guerres de religion tandis qu'à l'étage supérieur la promenade sur le chemin de ronde offre un splendide panorama dominant la vallée jusqu'aux monts d'Ardèche.
Mais la restauration du château des Roure telle qu'elle apparaît aujourd'hui est avant tout l'œuvre de l'Association des Amis du château des Roure qui, grâce à sa ténacité et son ardeur, a pu sauver le château.
Depuis le partage des propriétés à la Révolution, la demeure du Conte du Roure avait été donnée à des métayers qui se sont succédés à la tête du domaine jusqu’en 1973. Le château était alors une exploitation agricole et le premier étage renfermait les restes du dernier élevage de vers à soie.
C’est Michel Lascombe, boulanger à Privas, qui en épousant Ginette Payan, descendante des derniers métayers, restitue à l’édifice sa vocation première. Sous les conseils de l'abbé Jean Charay, alors conservateur, il lance un programme visant à la restauration du château et fonde avec Michel Pivert, l'Association des Amis du château des Roure. Ils parviennent à inscrire le bâtiment à l’inventaire des monuments historiques, l’ouvrant ainsi au public. Grâce à leur pugnacité, la visite du château des Roure est aujourd’hui l’occasion de découvrir ou redécouvrir une pièce importante du patrimoine ardéchois, tant architectural que sociologique et économique.
En quittant les lieux, Gérard, notre guide, nous ouvre l’accès aux oubliettes et, dans un décor de théâtre, raconte l’histoire d’Angélique dont le fantôme hante encore aujourd’hui la vieille demeure. Mais il ne livrera pas le vrai secret du château des Roure qui transporte la légende de la Vierge d’or et dont la fabuleuse statue est cachée quelque part dans les fondations du château.
Mais chut… c’est un secret !
 
Adresse
Château des Roure
07150 LABASTIDE-DE-VIRAC
04 75 38 61 13
www.chateaudesroure.com
 
Texte et clichés : Henri Klinz