C’est l’été et doucement, sous l’ardent soleil, nous progressons sur le chemin tracé sur l’échine de la colline du Chastelas. Notre destination finale se fait encore attendre un peu. Notre guide s’arrête et nous montre un point en bas. « Pour comprendre le château et le village dans la pente, il faut avant tout comprendre le paysage dans lequel ils s’inscrivent, explique Robert Valladier, des Amis de l’Histoire de la Région de Vallon. L’occupation humaine remonte à des temps préhistoriques dans les abris des grottes s’ouvrant dans la falaise bordant la plaine alluviale et la rivière. La proximité de cette dernière a offert aux hommes la possibilité de mise en culture de cette terre riche. Les générations se sont succédées sans discontinuer. Ainsi on retrouve des vestiges très anciens dans les hameaux au pied de la colline accueillant le château, notamment celui de Combe-Saint-Pierre. »
Nous arrivons à l’entrée du château dont les ruines ont récemment bénéficié d’intéressants travaux de réhabilitation et de sécurisation. Nous le pénétrons par un pont, autrefois pont-levis, franchissant un fossé taillé dans le rocher. Sur un côté, la falaise semble infranchissable. Ailleurs des remparts ponctués de tours dominant une série de terrasses protégeaient l’édifice. En dessous, le long de la pente abritée du vent du nord, certaines maisons du vieux Vallon sont antérieures au château. « Les hommes se sont implantés là pour laisser la plaine à la culture des céréales, poursuit notre guide. La terre est riche et facile à irriguer ; l’eau est en abondance. Et puis il y avait la forêt et l’abri de la colline offrant la pâture aux troupeaux et une exposition idéale à la vigne. »
Cette colonie humaine s’est maintenue jusqu’au XVe siècle, période où débuta le développement de Saint-Saturnin-de-Avalons, qui allait devenir le Vallon actuel. D’ailleurs il en prit très rapidement le nom un siècle plus tard. Ce site abritait alors trente-six maisons, contre cent trois au Chastelas et trente-sept dans les hameaux environnant la plaine. À la faveur du temps passant et des guerres de religion, le nouveau site grandit au détriment du Chastelas qui connut l’incendie de son château en 1569, sa restauration puis sa démolition en 1628. Finalement, comme souvent en pareil cas, il servit de carrière aux maisons voisines. « On pense que les gens ont quitté le Chastelas, appuie Robert Valladier, pour mener une vie plus facile dans la plaine. Sur la colline, la pente était trop forte et l’accès peu aisé. » Les hommes avaient aussi choisi la colline pour se protéger des crues de l’Ardèche, mais avec le nouveau site, ils prirent aussi en compte cette caractéristique. Il est vrai que la colère de la rivière se montrait souvent violente...
Peu après l’issue de la première guerre mondiale, les derniers habitants du vieux Vallon désertèrent la pente devenue hostile. Aujourd’hui l’avenir du site s’écrira avec la maîtrise du foncier, car si le château est une propriété communale, toutes les maisons sont des propriétés privées. Certaines furent réhabilitées avec soin et sont désormais habitées, d’autres ne sont plus que ruines défiant les lois de l’équilibre. « Le plus urgent, selon Alain Sixtre, président des Amis de l’Histoire de la Région de Vallon, serait que l’ensemble du site soit l’objet d’études sérieuses, de fouilles archéologiques minutieuses, car finalement nous ne savons pas grand chose. » En attendant, il est agréable de flâner dans les ruines du château, de jouir du panorama, et une fois la nuit tombée d’en admirer les lignes sages sous la lumière de son éclairage.