En arrivant au cœur même du village de Laurac-en-Vivarais, on est surpris. Surpris de découvrir l’importance de la domination de l’église due à son implantation au sommet d’un rocher. Ses belles pierres dorées écrasent les maisons se serrant le long des rues et bien en contrebas le long du ruisseau du Toufache, discret entouré de verdure. Il y a longtemps, sur cette éminence rocheuse se dressait le château de Laurac. Il ne survécut pas au passage des siècles et fut démoli pour laisser la place à la construction de l’église actuelle, au milieu du XIXe siècle et dédiée à Saint-Amans, premier évêque de Rodez, en Aveyron.
Bien sûr, le village, autrefois paroisse, possédait sa propre église. Le prieuré et l’église de Saint-Amant se trouvaient alors à l’extrême sud-est de la commune. Ils furent détruits au XVIe siècle. Durant des décennies après, les fidèles se rendirent en pèlerinage à la croix de Saint-Amant, plantée sur les ruines de l’église, espérant ne plus souffrir de terribles maux de dents. Il faut savoir que dès le XIIe siècle, les paroisses de Laurac et de Montréal n’en formaient qu’une, nommée Saint-Amant-des-Termes… Montréal ne prit son indépendance qu’en 1790. De ces temps anciens, il reste quelques témoignages le long des ruelles tortueuses et à la dénivellation capricieuse. Si les façades des maisons anciennes et des tours sarrasines des Xe et XIe siècles pouvaient s’exprimer… elles raconteraient sans doute des histoires incroyables aux passants baguenaudant. Des histoires, ils devaient s’en raconter autrefois autour du lavoir, au pied du rocher accueillant l’église. Ce magnifique témoignage du petit patrimoine architectural abrite aujourd’hui deux meules en grès d’un ancien moulin de Largentière. Mais comment se sont-elles retrouvées ici ?
Les Lauracois vécurent très longtemps de polyculture et d’artisanat. Puis vers le milieu du XIXe siècle, la culture du ver à soie lui fit connaître un développement conséquent. Sa population avoisinait les mille sept cents habitants. C’est sans doute grâce à ce développement économique et social qu’à cette époque, Laurac vit s’ériger en son cœur une école dont la renommée dépassait les frontières régionales. Elle était dirigée par Frère Serdieu. Cette école n’existe plus et le bâtiment est devenu une résidence de repos et de séjour de vacances, gérée par l’association Maisons Familiales Rurales. Pour perpétuer la mémoire de ce religieux, fondateur de l'enseignement agricole dans la région, il reste de lui, une grande statue inaugurée en 1901.
Dès que l’on pénètre dans ce village, que l’on monte le long des ruelles étroites, bordées de curieux rochers, on ressent immédiatement l’ambiance d’un village animé et vous remarquerez en allant voir les femmes laver encore leur linge au magnifique lavoir, eh oui, c’est la minute émotion, que le ruisseau Toufache qui aboutit sous le pont de Largentière, a été recouvert, bitumé. Suivez-le, on peut le repérer un peu plus loin, car ici commence l'aventure vers… les sous-bois. Et avec un peu d'imagination, à partir de ce lavoir on peut aussi y deviner le château. Au Moyen Âge, Montréal et Laurac n'était qu'une seule et même paroisse, Saint-Amans des Termes, l'église se situait à l'écart dans vallée. Au XVIe siècle, l'église fut détruite par les protestants. A St Amans des Termes, les villageois longeaient les berges du ruisseau Toufache que se partageaient les riverains et avec, les querelles liées au partage de ses eaux. Et à Prends-te-Gardes, appelé ainsi, car le lieu, présentant un carrefour était idéal pour les brigands, attendant cachés, leurs victimes… il s'en passait des choses dans ce petit village !
L’intérêt de la commune de Laurac, rebaptisée Laurac-en-Vivarais le 1er avril 1961 - et ce n’est pas un poisson -, ne réside pas qu’au creux de ses vieilles pierres, aussi belles soient-elles. Son territoire possède un riche réseau hydrographique, composé de pas moins de onze ruisseaux: de la Planche, de la Martinette, de Charbonnier, de Chiralet, de Franzonne, des Charlots, du Breuil, du Bulien, de Toufache et des Farnayres, et… le plus important de tous, le ruisseau de Blajoux. Avec ses onze kilomètres de cours, il est un affluent de La Baume. Il traverse une plaine riche cultivée de tout temps. Sauf peut-être pendant la période très troublée de la Révolution où elle connut des rassemblements républicains donnant la réplique aux camps de contre-révolutionnaires de la plaine de Jalès, plus au sud.
En suivant ses ruisseaux, après une déambulation dans le village aux accents médiévaux, nous ne pouvons que nous laisser guider par nos yeux et nos pas qui nous mènent très vite dans les garrigues du plateau calcaire des Gras, au sud de la commune. Ou jusque dans les vastes forêts de pins, riches en champignons à la bonne saison, suivant les courbes de niveau du terrain plus accidenté au nord jusqu’à Montréal et même jusqu’à Sanilhac… si le pique nique est prévu pourquoi pas !