L'eau miraculeuse de St Andéol-de-Fourchades

Article paru en octobre 2014
Mis en ligne en juillet 2022

Sur la route sinueuse qui descend de Lachamp-Raphaël à St-Martial, on traverse le petit village de Saint-Andéol-de-Fourchades dont l'église est bâtie en bordure immédiate de la chaussée. La façade de cet édifice, de style roman à doubles corniches, élevée en pierre grise, rappelle les constructions des abbayes cisterciennes. À l'intérieur se cache une curieuse histoire d'eau miraculeuse capable de guérir certaines maladies des yeux et de la peau.
 

En poussant la porte, on est d’abord surpris par une atmosphère étrange, indéfinissable mais rassurante, qui occupe les lieux. La nef centrale bien éclairée par des vitraux lumineux offre un décor classique où les pierres grises, bien que grossièrement taillées, se mêlent judicieusement aux boiseries claires pour former un ensemble harmonieux. Sur la droite s’ouvre une petite porte où des marches étroites permettent d’accéder sous l’édifice. En ce lieu, s'expose un puits creusé dans une salle voûtée au plafond bas. La lumière glauque laisse deviner des pierres chargées d’histoire, comme imprégnées de la souffrance des visiteurs venus dans ce lieu. Dans un coin sombre, derrière un barreaudage épais, l’ouverture du puits nous apparaît secrète et énigmatique. Depuis 1987, date à laquelle l’église a été entièrement rénovée, l’accès au puits a subi de nombreuses transformations. Autrefois le visiteur y descendait librement par des marches incertaines pour aller quérir l’eau aux vertus salutaires. Aujourd'hui, la descente sous l'église est réglementée en raison des impératifs de sécurité.
Ces dernières années encore de nombreux pèlerins, visiteurs ou curieux se croisaient entre les marches tortueuses pour descendre jusqu’au puits « miraculeux ». Les dimanches après-midi, évoluait un ballet continu de personnes, souvent venues en famille, se pressant sous l'église pour y remplir gourdes et bidons. Des pèlerins en quête de guérison appliquaient sur leurs yeux ou sur leur peau, selon, un peu d’eau et même en absorbaient, dans l’attente d’un signe divin. Car c’est bien de phénomènes étranges dont il est question à Saint Andéol de Fourchades.
Madame C.ne tarit pas de témoignages sur les effets de l’eau miraculeuse. Elle se souvient de cette jeune fille venue de Valence, le corps couvert d’eczéma. Et après avoir lavé sa peau meurtrie, puis absorbé de l'eau, elle est revenue trois semaines plus tard la revoir. Sur sa peau, toutes traces avaient disparu. Il ne subsistait vraiment aucune marque.  Poursuivant son récit, notre témoin ajoute : «  Et puis Marguerite, cette dame de la région dont le corps était couvert de plaques violettes, semblables à des « envies ».  Elle avait couru tous les dermatologues d’Aubenas et de Valence, sans résultat. Malgré quelques réticences, elle finit par se rendre au puits du Père Blachère pour y absorber un peu d’eau et s’en couvrir le corps. En quelques semaines elle fut guérie. Mais, parfois l’eau était sans effet ; la personne malade était alors assujettie à une neuvaine pour solliciter sa guérison », nous précise la vieille dame. La réputation des bienfaits de l'eau de Saint-Andéol-de-Fourchades s'était tant répandue, que Mme C. dut en expédier par voie postale jusqu'à Paris.

Un curé pas ordinaire
Les phénomènes dont on parle à Saint Andéol de Fourchades, seraient étroitement associés à la personnalité du curé de la paroisse, le Père Noël Blachère (1663-1741). Il aurait prodigué quelques guérisons. Ce prêtre Ardéchois, qui a vécu sous Louis XIV, fait l’objet de nos jours encore d’une réelle vénération dans notre région. Sa tombe, visible dans l’église, est toujours fleurie. Nombreux sont les pèlerins qui viennent s’y recueillir. La statue placée au-dessus de la pierre tombale a été offerte il y a une petite dizaine d'années par une maman en remerciement des bienfaits sur son fils aveugle.
À la mort du prêtre, une petite chapelle lui fut réservée, construite près du rocher du « point de foudre », où il aimait tant chaque jour se recueillir. Là, à quelques mètres du village, le modeste édifice, dédié à la Vierge est l'objet de visites et de recueils anonymes. À l'intérieur une étonnante statue de la Vierge est posée sur un socle taillé dans un tronc de noyer. La Sainte mère en costume d'or, richement décorée, scintille sous l'éclat des verreries telles des incrustations de pierres précieuses, tandis que de fins chapelets couvrant ses épaules, pendent en sautoir.

Un lieu de ressourcement, une balade… aussi
Pour beaucoup cet endroit est plein d’énergie et l’on dit que « l’on y ressent quelque chose; une force indéfinissable qui permet de se ressourcer ». Pour d’autres, ce « point de foudre »  lieu de connexion entre le ciel et la terre n’est autre qu’une zone géologique volcanique d’où émane une intense force magnétique.
Saint-Andéol-de-Fourchades détient aujourd'hui encore une fabuleuse histoire où croyances et mystères se mêlent étroitement. Même si l’accès au puits est aujourd’hui condamné, c’est néanmoins l’occasion d’une belle promenade avec à la clé, une visite de l’église et une petite balade jusqu’à la chapelle du père Blachère.
C'est l'occasion aussi d'une sortie jusqu'au lac de Saint-Martial en revenant par la ferme de Bourlatier ; juste le temps d'une crique, par exemple, la spécialité du pays, une tartelette aux myrtilles, à savourer sur l'esplanade du Gerbier de Joncs…
 
Texte et clichés : Henri Klinz