L'abbaye Notre Dame des Neiges

Article paru en décembre 2016
Mis en ligne en juillet 2022

La première chose qui frappe en arrivant à la trappe de Notre Dame des Neiges, c'est l'absence de portail  à l’entrée et la beauté du site. Ici, pas de mur d'enceinte, pas de clôture, mais un domaine de près de 600 hectares librement accessible à tous, signe d'ouverture au monde extérieur.
 

Quinze religieux de la communauté cistercienne et cinq civils y vivent à l'année, dans la solitude des grands espaces de la montagne ardéchoise, aux portes de la Lozère entre Saint-Laurent-les-Bains et La Bastide-Puylaurent. Le monastère fut créé en 1850 par sept religieux partis à pied de la maison-mère d'Aiguebelle (26), et tirée par un cheval, une charrette transportait leur maigre mobilier. Sur place ils trouvent refuge dans la vieille grange de La Felgère au toit de genêt, acquise par leur ordre, et qu'ils baptisent "Notre Dame des Neiges". Malgré la dureté du climat, la burle en hiver et l'isolement de la montagne ardéchoise, les moines défrichent les terres pour y planter des sapins, cultiver le seigle, les pommes de terre et cueillir l'arnica. Fidèles à la règle de Saint Benoit, travaillant de leurs mains, nourris d’un seul repas par jour, assistés par la population locale, ils construisent d’abord une chapelle, puis plus tard, les autres bâtiments dont l'abbaye, la salle du chapitre et l'hôtellerie. La congrégation s’accroit considérablement avec près de 90 nouveaux frères venus d'horizons divers. Expulsés en 1879 par le pouvoir républicain, les moines trouvent un temps refuge dans un monastère, en Syrie. Ils reviennent en Ardèche afin de poursuivre les travaux de l'abbaye qui sera détruite par un incendie en 1912 mais reconstruite aussitôt. Après la première guerre mondiale où 7 d'entre eux sont tués sur le front, (alors que leur monastère est occupé par les Allemands et utilisé comme hôpital militaire), les moines reprennent l'activité économique du domaine devenu célèbre pour l'élevage du vin ramené des plaines du Gard, afin d'être bonifié en altitude. En effet, il est reconnu qu'un vin vieilli en altitude, gagne en qualité.

Aujourd'hui, les bâtiments épars nous permettent de déambuler librement d'un espace à l'autre, sans perturber le travail et le recueillement des frères. Seule l'abbaye ne se visite pas. L'église, toujours ouverte, est fréquentée de jour mais également de nuit par les moines qui y prient et célèbrent l'eucharistie. Sept offices se déroulent chaque jour, dont le premier à 4h30 (les Vigiles ou Matines) le dernier à 20h30 (les complies). L'église accueille également les pèlerins de passage, venant s'y recueillir librement. L'édifice réaménagé en 1965, plusieurs fois restauré a été remis en peinture en 2013. Cet espace très lumineux résonne quotidiennement du chant des prières des moines. Au sein de l'abbaye, l'ancienne salle du chapitre a été conservée, mais elle est complétée aujourd'hui par une salle capitulaire, c’est-à-dire de réunion, plus confortable. Elle jouxte celle de lecture où chacun dispose d'un pupitre de travail. L'accès aux cellules se fait par le cloitre réhabilité, lieu de rencontre et d'échange entre les frères. La bibliothèque, tenue par frère Jacques contient environ 48000 ouvrages. Elle est fréquentée uniquement par les moines, parfois par des savants ou des chercheurs sur autorisation spéciale du père abbé.

Un lieu d’accueil pour toutes personnes qui le désirent
L'hôtellerie, placée sous la responsabilité de frère François, permet d'accueillir les pèlerins venus se ressourcer. Cette hôtellerie dispose d'une trentaine de chambres réservées pour des retraites spirituelles. Elle est complétée par "La maison de Zachée", un espace, un lieu de refuge et d'accueil de randonneurs sur le chemin de Stevenson. De Pâques à Toussaint, une quarantaine de personnes se retrouve ainsi à l'étape, pour un repas du soir et un couchage avant de repartir le lendemain. Le régime d'accueil est celui de l'hôtellerie monastique où chacun offre en remerciement une participation à sa convenance. Un vaste parking permet également le stationnement des camping-cars. La cave a cessé son activité depuis une dizaine d’années. C'est aujourd'hui devenu un bel espace d'exposition artistique ouvert au public. La scierie également n'existe plus, elle fait partie des 4500 m² de bâtiments qui ont été écrasés, supprimés il y a une dizaine d'années.

Un lieu de vente de produits régionaux et religieux
La boutique entièrement rénovée, offre des produits monastiques réalisés dans les abbayes de Chambarand, -Bonneval- Barroux - La chartreuse… Outre les articles religieux et les produits régionaux, on y trouve en libre service une vaste librairie des ouvrages les plus divers (art, culture, loisirs…).

Sur les traces de Charles de Foucauld
L'espace d'exposition Charles de Foucauld se visite selon un parcours pédagogique retraçant la vie de ce moine du désert ayant effectué ici son noviciat. Tout près, une belle petite chapelle, inaugurée en décembre 2006 contient un reliquaire du frère défunt. Ce bâtiment est également ouvert au public, ainsi que la salle de projection où un film y est diffusé dévoilant une présentation générale du monastère, un exposé sur la vie de ses occupants ainsi que sur celle du bienheureux Charles de Foucauld.
Loin de l'image traditionnelle et austère des moines encapuchonnés, c'est une communauté ouverte qui accueille ses visiteurs, malgré la rigueur de la vie monastique et le temps passé à la prière. Les membres de la communauté religieuse suivent la règle de "la stricte observance" tirée de l'enseignement de Saint Benoit au VIe siècle. La journée débute à 4 h par la prière ; les moines se retrouvent quotidiennement à l'église dans le silence et le respect de chacun. Les repas sont pris en commun et en silence, puis chacun retourne à son travail.

Qui sont ces moines ?
Le monastère, à travers ses équipements soignés, est avant tout le domaine des hommes. Ce sont souvent des jeunes novices, entrés à 20 ans, à l'abbaye où ils ont fait vœux de stabilité. Ce sont aussi des hommes issus de la "société civile" ayant déjà exercé une activité professionnelle et entrés sur le tard dans l'ordre religieux. Leur vie est faite avant tout de spiritualité à la recherche de Dieu ou répondant à son appel. Ils ont de 45 à 97 ans. La trappe de Notre Dame des Neiges accueille chaque année plusieurs milliers de personnes, du touriste de passage aux retraitants. C'est un milieu ouvert et accueillant (des croyants ou des non-croyants) mais avant tout, un lieu de travail et de prière et de respect. Les moines Trappistes vivent dans le silence, la prière et le travail manuel.


* L'origine du mouvement trappiste remonte au Moyen Âge. L'Europe connaît alors une période de ferveur religieuse. L'ordre cistercien est fondé au VIe siècle par Saint Benoît. Plusieurs communautés de moines se développent sous l'égide des Cisterciens dont une de ces communautés est l'ordre Trappiste. (Dans la région du Perche, en Normandie, le mot trappe désigne les marches qu’il faut descendre pour aller pêcher aux plans d’eau.)
 
Portrait
Dom Hugues Chapelain de Seréville, élu par ses frères le 22 juillet 2003, père abbé de Notre Dame des Neiges. Agé de 53 ans il est originaire de la Haute-Savoie et profès de l'Abbaye de Notre Dame de Soligny, dans l’Orne en Normandie.

Présence à l'abbaye de personnes célèbres
- Robert Louis Stevenson : Le 26 septembre 1878, l'écrivain écossais accompagné de Modestine trouve refuge à l'abbaye dont il parlera longuement dans son célèbre ouvrage "Voyage avec un âne dans les Cévennes".
- Charles de Foucauld  : Le16 Janvier 1890 le Vicomte Charles Eugène de Foucauld de Pontbriand entre à la trappe où il effectue son noviciat avant de repartir pour l'abbaye d'Akbés sous le nom de frère Marie-Albéric. P. Ch. De Foucauld  fut béatifié le 13 novembre 2005, à Rome par le Pape Benoît XVI.
- Robert Schuman, Père de l'Europe, ancien ministre des Affaires étrangères et président du conseil sous les troisième et quatrième républiques, a séjourné à l’abbaye à la fin de la guerre. Son procès en béatification est toujours en cours.
 
Vous y rendre
- Par La Croix de Bauzon (63km / 1h20 environ) ; à partir d'Aubenas, prendre la RN 102 en direction du Puy - A l'entrée de Lalevade tourner à gauche au giratoire en direction de Jaujac/La Souche (D 19) - Passer à La Croix de Bauzon - Passer au Bèz puis Masméjean-  Poursuivre en direction de St Etienne de Lugdares - traverser le village - continuer en direction de La Bastide-Puylaurent - Dans le village prendre la direction de St Laurent les Bains - La Trappe est située à quelques kilomètres à la sortie de St Laurent, sur la gauche.
- Autre itinéraire possible par le col de la Chavade (72km / 1h30 environ) et qui retrouve l'itinéraire ci-dessus à hauteur de l'auberge du Bèz.

Abbaye de Notre Dame des neiges
07590 Saint Laurent Les Bains
04 66 46 59 00
www.notredamedesneiges.com
 
Texte et clichés : Henri Klinz