Le nouveau courant de pensées libérait soudainement des esprits chagrins qui jusqu'alors, n'avaient manifesté aucune controverse. Ainsi, à cette période, certains Burzetains ont exprimé ouvertement leur volonté de ne plus avoir à "se tourner vers le bon dieu pour avoir l'heure". En effet, dans ce petit village, au fond de la vallée de la Bourges, comme dans beaucoup d'autres communes il était courant de trouver une horloge accrochée ou intégrée au clocher de l'église, et jusqu'alors personne ne s'étonnait de cette situation.
Des irréductibles ont conjuré la commune d'enlever cette horloge afin de la placer dans un autre lieu, éloigné de l'église. Il fut ainsi élevée, en face de l'édifice religieux, mais sur la rive opposée de la Bourges, une tour carrée, bâtie sur un promontoire rocheux, surplombant le bourg, afin d'y installer la nouvelle horloge.
Cependant, à la manière d'un Gustave Eiffel, n'ayant d'autre ambition, en construisant sa tour métallique, que de dépasser les hauteurs des tours de Notre Dame, à Burzet comme à Paris, nos « ultra » désiraient également supplanter l'Eglise catholique, en construisant de manière symbolique, une tour de l'horloge (tel est son nom aujourd'hui) plus haute que le clocher de l'église. Ainsi fut érigée cette tour que l'on peut contempler depuis la route de Sagnes-et-Goudoulet.
La victoire des laïcs fut de courte durée. C'était en effet sans compter sur la réaction des "conservateurs" et de la tradition populaire, qui anime encore aujourd'hui ce petit village de l'Ardèche où subsistent les manifestations annuelles de la reconstitution de la passion du Christ, de la montée au calvaire et, le culte de St Bénézet, constructeur du Pont d'Avignon. Les paroissiens décidèrent alors d'édifier une autre construction, dépassant en hauteur la tour de l'horloge. C'est ainsi que fut construite, à quelques dizaines de mètres au dessus de l'horloge "la statue de la vierge"...
Le nouveau courant de pensées du début du XXe siècle avait aiguisé les passions, ouvrant une déchirure dans la population qui s'était divisée en deux camps dans lesquels les rivalités étaient constantes. Le petit village de Burzet avait même deux fanfares, celle "du curé" et celle de "la commune". Les deux cliques défilaient simultanément à l'occasion des festivités. On dit couramment que les joueurs de la grosse caisse échangeaient même à l'occasion, quelques coups de mailloches en se croisant dans les rues du village !
La fin du XXe siècle et celui que nous vivons actuellement ont heureusement gommé ces querelles partisanes.
Tandis que des esprits éclairés développaient une nouvelle philosophie liée à la liberté de conscience, axée sur la tolérance, cette attitude qui nous permet aujourd'hui de vivre dans la paix et la sérénité.