Château de Hautségur

Article paru en février 2017
Mis en ligne en septembre 2022

C'est sur la commune de Meyras, entre Aubenas et Le Puy, que se dresse le château de Hautségur,
dans la vallée de l'Ardèche. La forteresse séduit par son architecture dont les formes brutales
de la force guerrière ont épousé au fil du temps d'élégantes lignes de style.
 

Voué plus ou moins à l'abandon, le château est repris en 2010 par Patricia Demangeon qui se lance dans l’épreuve de la restauration. Maniant la pelle, taillant le bois, la bouillonnante Patricia a jeté toute son énergie dans la bataille afin de rénover la bâtisse et d'en faire, a-t-elle décidé, un lieu de partage.

Le château de Hautségur (sans accent sur le "e"), autrefois dénommé "Rochegûre" est connu depuis le XIIe siècle. Son nom signifie "sur un lieu sûr", en raison de sa position stratégique. De son histoire écrite en pointillé, on retient principalement le fait que Hautségur fut construit pour servir d'avant-poste, afin d'assurer la protection du Château de Ventadour, installé lui, en contrebas. Partiellement détruit par "les protestants en 1626, au cours d'une escopette menée à Meyras", lors des guerres de religion, il fut la propriété de la célèbre famille Langlade d'origine notariale, sortie de La Souche, et installée à Jaujac, puis à Meyras où elle fit fortune. "A la suite de bonnes alliances" les Langlade achetèrent des terres nobles, entre autres la Baronnie des Eperviers (paroisse de St Cirgues en Montagne) et le château de La Croisette (aujourd'hui Ventadour). Florentin Benoit-D'Entrevaux écrit "Le seigneur François de Langlade n'était pas un petit personnage, car il avait siégé au traité de La Borie dans le parti protestant et avait acheté le château de Hautségur". Le château passe ensuite à la Famille de Chanaleille qui le vend le 20 juin 1752, au prix de dix mille livres à Jean Neyron (supposé Neyrand), docteur en droit, qui lui donnera le nom de "Hautségur" (on trouve parfois l'orthographe de ce nom complétée d'un "e" final). Cette famille conserva le bien jusqu'en 1892. Les successions se perdent à la fin du XIXe siècle et au cours du XXe siècle, période pendant  laquelle on suppose le château plus ou moins abandonné.

Le plan de masse du château, semblable à celui du Bruget à Jaujac, montre des formes puissantes à vocation militaire. Ici, pas de cour intérieure ni de jardin fleuri. Construit sur un espace réduit, tout en hauteur, muni d'une tour en façade, c'est avant tout un poste d'observation remarquablement situé au-dessus de la vallée. Des murs hauts, des arquebusières, des échauguettes attestent de sa vocation défensive, même si des appartements confortables situés au troisième niveau offraient au seigneur du lieu (notamment Jean de Langlade en 1591), un abri sûr, le temps de son séjour dans la citadelle. Comme ce fut le cas pour de nombreux châteaux, Hautségur a subi de multiples modifications au cours de son existence : aménagement d'une terrasse au premier étage, - construction des cheminées à tous les niveaux - agrandissement des ouvertures avec l'apparition des fenêtres à meneaux, héritage de la Renaissance italienne, etc. Peu à peu, le château de Hautségur a donc délaissé sa vocation militaire première, comme la plupart des châteaux forts qui se trouvaient démunis face aux nouvelles armes comme les canons. Il est ainsi devenu au fil du temps une noble résidence.

Au cours du XXe siècle, la citadelle était vouée à la ruine. La toiture très endommagée laissait ruisseler les eaux de pluie à l'intérieur de la demeure. La remise en état nécessitait des travaux importants pour  redonner vie à la vieille Dame. Patricia Demangeon, ancien professeur d'Anglais, originaire de Mazan (84), découvre le château en 2008. Séduite par la beauté de la demeure, un coup de cœur la pousse à son  acquisition. Trois propriétaires différents sont héritiers de la demeure et c'est donc par étapes successives que Patricia en fait l'acquisition et par là même, assure la réunification du bien le 12 février 2012. Elle passera son premier hiver dans une caravane au pied de la demeure. Elle commence par aménager un espace de vie au premier étage où elle installera ses appartements. Dotée d'une belle énergie, elle participe ardemment aux travaux. Patricia assistée de quelques artisans ardéchois, participe au déblaiement des parties écroulées, la fixation des enduits, la pose de dalles...

La remise en état de la charpente est un chantier énorme, afin de couvrir d'un seul tenant, sans pilier intermédiaire, les 120 m² compris entre les quatre murs de la bâtisse. Ce travail de couverture se double d'une difficulté de taille : les quatre tourelles des angles dépassent de la hauteur de l'édifice. En conséquence, chacune d'elle devra recevoir une charpente indépendante, taillée sur mesure. La grande salle voûtée du rez-de-chaussée, agrémentée d'une belle cheminée est remise en état. Les pierres sont jointoyées, de même que la façade principale de la demeure où les croisées des fenêtres à meneaux sont remplacées. A chaque étage, les plafonds sont dégagés afin de faire apparaître un décor à la Française ; ici à la fougère, une curieuse disposition des boiseries apparue au XVIe siècle. Les enduits intérieurs sont décroûtés et les joints regarnis. Sur la façade nord, endommagées au cours de la Révolution, deux échauguettes ont disparu. Il est décidé de les reconstruire.

En mai 2014, Patricia Demangeon obtient le premier prix de La French Heritage Society, Boston Chapter ce qui lui permet de financer partiellement les travaux. Deux tourelles identiques à celles d'origine, voient le jour. En mémoire et en reconnaissance des dons issus de la souscription américaine, elle scelle dans le mur de l'échauguette Nord-Est, une potiche où sont renfermées les huit pages du parchemin mentionnant les noms des généreux donateurs ainsi que celui des artisans ayant réalisé les travaux, dont Guilhaume Bourrat, tailleur de pierres à Beauvène et Raphael Roqueplan charpentier à Vesseaux.           
                               
Patrica Demangeon organise et conduit elle-même les visites du château. A cette occasion il est intéressant d’admirer les cinq cheminées qu’abritent le bâtiment, l'escalier à vis central de la grande tour, les plafonds à la fougère du deuxième étage ou de contempler le paysage du haut du belvédère de la tour principale. Au rez-de-chaussée, une grande pièce voûtée abrite les collections d’artistes venant exposer au cours de l'été. Patrica Demangeon y a dessiné ses armoiries gratifiées de sa devise " Partage, solidarité, respect ". Après avoir été une citadelle de guerre, le château de Hautségur, est en passe d'accueillir des chambres d'hôtes dans la chambre même et le salon des seigneurs ayant vécu autrefois dans cette demeure.
Sources :
- Collection privée Patricia Demangeon.
- Les châteaux historiques du Vivarais de Florentin Benoit-D'Entrevaux.
- Châteaux en Ardèche de Henri Veyradier.
- Ardèche terre de châteaux de Michel Riou.

 
Visites :
Tous les mercredis à 16h, d'Avril à Novembre.
Hors saison : sur rendez-vous.
Patricia Demangeon - château de Hautsegur  07380 Meyras.
06.75.81.52.05      
patricia.demangeon@orange.fr
 
Pour vous y rendre :
Depuis Aubenas suivre la RN 102 en direction du Puy. Trois kilomètres après Pont-de-Labeaume prendre à droite en direction Meyras. Dans le village de Meyras près de la petite chapelle, suivre à gauche le fléchage "Hautsegur".
 
Texte et clichés : Henri Klinz