Aux portes de l'Ardèche et du Gard.
Bessas est un village tranquille, loin de l’agitation des sites touristiques pourtant proches. Sa visite offre un moment de calme et d’apaisement au milieu des vieilles pierres chargées d’histoire. Oui, il faut prendre la peine de venir jusqu’à Bessas et partir à pied arpenter ses ruelles et ses places, prendre le temps de s’asseoir à l’ombre et écouter le calme de ce village.
Depuis la plaine de Berrias pour arriver à Bessas, il faut, soit contourner la montagne de la Serre en faisant un grand détour par Saint-Paul-le-Jeune et la vallée de la Claysse par Saint-André puis Saint-Sauveur-de-Cruzières, soit passer par Vallon-Pont-d’Arc et Vagnas. On peut aussi franchir le modeste col de la Serre. Bref, Bessas ne se situe aucunement sur les axes principaux de circulation et ce petit village vit paisiblement au milieu des vignes, des mûriers et de la garrigue sur sa butte dominant la plaine. Tandis qu’au sommet du Puy Lacher, à précisément 473 m d’altitude, flotte au vent le drapeau de l’Occitanie, initiative de l’association Racines et Patrimoine Occitans, marquant ainsi une appartenance affirmée.
Bessas a conservé au fil des siècles son caractère agricole. Actuellement l’activité varie entre élevages caprins, ovins et avicoles, entre cultures de céréales, les vignes et les oliviers. Les mûriers encore présents ne sont plus que le témoignage d’une sériciculture désormais oubliée. Son environnement à deux pas des gorges de l’Ardèche et de la Cèze, est très beau. Les cigales chantent jusqu’au cœur même du village, là où les arbres s’épanouissent entre les maisons magnifiquement restaurées.
Au fil des ruelles, des passages voûtés, des petites places, et Bessas se montre sous un habit de pierres ocres parfaitement mises en valeur. De la place de la mairie, en bas du village, on remonte à pied n’importe quelle rue, elles mènent toutes au château et à l’église, les deux richesses patrimoniales locales. Un peu plus loin à la sortie du village derrière le château, une table d’orientation ponctue un point de vue incomparable sur la plaine cultivée, la petite ville de Barjac et les collines à l’ouest fermant le paysage.
Le château fût érigé au XVIe siècle, vers 1570, par Laurent Cheyres, seigneur de Bessas. Imposant bâtiment flanqué de quatre tours rondes aux angles, à l’image de celui de Craux, de Vogüé et encore d’autres en Ardèche. Mais la vie ne fut pas toujours paisible à Bessas. Si rien de notable n’est à signaler au cours de l’époque médiévale, il en va autrement pendant les guerres de religion.
Semblant plus modeste que le château voisin, l’église actuelle et celles qui l’ont précédée ont connu ici une histoire mouvementée. La présence d’un lieu de culte à Bessas semble remonter avant l’an mille, certains historiens évoquent même le VIIe siècle, alors que Bessas se nommait Beciate. Il ne reste aucun témoignage de ce premier édifice. En revanche, la visite en 1501 de hauts personnages ecclésiastiques atteste de la présence d’une l’église paroissiale. La raison de cette visite était de vérifier l’état général de l’église et de son mobilier. Au cours des guerres de religion, cette église dédiée à Saint-Étienne fut ruinée et pendant de nombreuses années, les messes furent célébrées dans une maison du village.
À l’automne 1645, les habitants et le consul de Bessas demandèrent au maçon, Jacques Blisson, de bâtir une église au cœur du village en utilisant les pierres de la vieille église, sans doute pour limiter les frais. Quelques années plus tard, l’église était livrée ! Elle n’avait pas de clocher, une cloche au château servait à l’appel des fidèles pour les offices et à rythmer la vie quotidienne. Un texte de 1714 précise la présence du clocher de l’église se déclinant en un simple mur en triangle avec une croix à son sommet et muni d’une seule cloche. Cette église subit de nombreuses dégradations pendant la révolution française et il faut attendre 1820 pour lui voir son aspect actuel.
Le plus beau de l’église réside à l’intérieur. Elle abrite un retable en bois polychromé daté du début du XVIIe siècle et inscrit à l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques. Il faut prendre le temps d’admirer cette œuvre d’art. Elle est une réponse apportée, à l’issue du Concile de Trente, par l’église catholique aux protestants. L’installation de retable dans le chœur des églises fut un mouvement ample dont l’Ardèche bénéficia grandement ; on peut en admirer dans les églises des Vans, Aubenas, Quintenas, St-Jean-de-Pourcharesse, Gravières, Payzac ou encore Bourg-St-Andéol… Le retable, associant sculptures et peintures, est à la fois un rappel des fondements de la religion catholique destiné aux fidèles ne sachant pas lire, à l’image des statues, des chemins de croix et des vitraux, et une réplique aux thèses défendues par les protestants. Le retable de l’église de Bessas comporte trois niveaux. De bas en haut, le premier est l’autel, le tombeau de Jésus, considéré comme la Terre ; le second est consacré aux saints faisant le lien entre le Ciel et la Terre, ici Saint-Étienne, patron de la paroisse, est représenté avant sa vision de l’ouverture des Cieux ; enfin le troisième est le Ciel et Dieu, ce dernier est physiquement représenté les bras écartés protégeant les anges et accueillant Saint-Étienne lors de sa montée aux Cieux. Mais il est tout à fait possible à chacun de ne voir en ce retable qu’une magnifique œuvre d’art… Le temps n’a pas épargné ce retable et, entre 2005 et 2009, il bénéficia d’une restauration de qualité qui permet à tous de l’admirer à nouveau dans le chœur de l’église, sa place d’origine.
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