Barnas

Article paru en mars 2017
Mis en ligne en septembre 2022

L’Ardèche est encore adolescente quand elle caresse la terre de Barnas à son passage sous l’œil bienveillant du Rocher d’Abraham. Ici, de hameaux en hameaux, la commune s’est développée petit à petit dans les plis des montagnes.
 

Saint-Théophrède, là où sont érigées l’église et la mairie, Lamothe et Le Bouix en fond de vallée, Lafarre, Bruc et quelques autres au long des pentes en rive gauche de l’Ardèche face aux premières pentes du Rocher d’Abraham : voilà comment se présente le village de Barnas à ses visiteurs. Autrefois, dès le VIIIe affirment quelques historiens, la communauté villageoise se rassemblait sous le nom de Bruc. Saint-Théophrède ne fut choisi que plus tard en souvenir d’un moine, sanctifié par la suite, martyrisé en 732 par les Sarrasins, pour donner à la paroisse le nom de Saint-Théophrède-de-Bruc. Il existait déjà une église depuis longtemps à Bruc. Les hameaux se trouvaient trop éloignés de Thueyts pour que leurs habitants puissent aller régulièrement à la messe. Restaurée au XIXe siècle, à partir de 1834 plus précisément, ce fut autour de cette église et de sa paroisse que se façonna l’idée d’une nouvelle commune. Ce n’est donc que beaucoup plus tard que Barnas s’imposa, lors de la séparation de son territoire de celui de la commune de Thueyts en 1913 et avec l’ajout d’une partie de la commune de Mayres, le hameau de Lamothe, en 1926.

À peine en aval, sur la rive droite de l’Ardèche, également au VIIIe siècle, un certain Aldigerius Ythier faisait bâtir le château de Chapdenac. Il n’en reste qu’une tour aujourd’hui, datée du XIe siècle, et quelques pans de murs noyés sous la végétation. Cette très ancienne forteresse surveillait un passage à gué et était un poste avancé sur la vallée de l’Ardèche… Autre temps, autre architecture, on remonte un peu la vallée et on oublie l’ancien gué pour admirer un magnifique pont en bois réalisé il y a quelques années seulement. En contrebas au bord de la rivière, une multitude d’arbres à papillons attire ces insectes aux couleurs chatoyantes. Innocentes victimes, les troncs des saules, aulnes et autres frênes, se retrouvent taillés en pointe comme un crayon par les castors très actifs en ces lieux. Plus discret est le cingle plongeur qui pêche en marchant sous l’eau. S’arrêter un temps au bord de l’eau et observer la nature, voilà une bonne idée car le véritable atout de Barnas est sans aucun doute la nature généreuse enveloppant le village.

Peu de terrain plat ici, à part l’étroit fond de vallée où un couple de maraîcher entretient une terre généreuse. Des pentes et des terrasses partout ailleurs pour accueillir les châtaigniers et les plantations de résineux, les troupeaux de moutons. À l’ubac, en rive droite de la rivière, l’ombre de l’hiver plonge la forêt dans une somnolence qui contraste avec l’adret en rive gauche où le soleil inonde les terres. Les hommes ne s’y sont pas trompés, ils se sont installés sur ce versant et ont développé une polyculture vivrière au sein de laquelle la récolte des châtaignes occupait une place primordiale. Plus haut sur ce versant idéalement exposé, les bois de hêtre et les vastes étendues de myrtilles invitent à la promenade. Oh bien sûr, le paysage a bien changé en quelques décennies. La forêt et les friches gagnent du terrain sur les terres de cultures et les pâturages abandonnés.
Au fond de la vallée aussi les choses ont évolué. La petite route qui se faufilait autrefois le long de la rivière est devenue une voie de passage très fréquentée, la RN102 ! Certes elle apporte son lot de nuisances, mais elle a aussi permis l’installation en bord de route d’une activité commerciale qui perdure malgré tout. Au cœur du village, des ateliers d’artisans d’art, marqueterie, verrerie et autres, se sont installés, donnant une image dynamique à ce tout petit village qui mérite que l’on prenne le temps d’une pause pour en découvrir les secrets. Et si au cours d’une promenade un point de vue, le sommet du Rocher d’Abraham ou un autre plus modeste, vous laisse apercevoir les sommets alpins enneigés, n’oubliez jamais le diction : « Si tu voies les Alpes, dans deux jours il pleut. »
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www.barnas.fr
 
Texte et clichés : Bruno Auboiron