V) DE SAINT-REMÈZE À SAINT-MARCEL-D’ARDÈCHE

Article paru en juillet 2025
Mis en ligne en juillet 2025

Les derniers instants

L’eau, celle de l’Ardèche et surtout celle tombant du ciel depuis des millions d’années, a creusé d’innombrables et improbables grottes dans le calcaire. Malgré sa quête incessante, l’Homme d’aujourd’hui ne les a pas toutes découvertes. Peut-être, dans l’ombre et le silence, se cachent de plus anciennes merveilles de l’art pariétal que celles de la grotte Chauvet. Au creux des grottes de Saint-Marcel-d’Ardèche, le mariage de l’eau et de la pierre sédimentaire a dessiné d’oniriques paysages souterrains. Des profondeurs à la surface du plateau calcaire où l’eau est présente le long du sentier des moulins à Saint-Remèze, le retour à l’air libre et au soleil est heureux. Libre et embaumant au sein des plantations la lavande accompagne la vigne pour dessiner le paysage autour de Saint-Remèze. Enfin, retour dans les Gorges pour admirer le funambule du monde végétal : le genévrier de Phénicie, un arbre vieux comme le Monde.

Une petite randonnée : Le lavoir et les trois moulins
  

Depuis la mairie de Saint-Remèze, on passe sous la vieille porte du village, devant l’église et on suit à gauche en bas pour trouver le ruisseau des Fonts. Longer ce ruisseau est aisé jusqu’au lavoir. Desservi par un large escalier caladé et une passerelle en pierres, ce lavoir date de 1860. Il est couvert et son bassin unique laissait la place pour dix-huit lavandières. Les murs sont d’ailleurs encore couverts de vieux graffitis au bleu de lessive utilisé pour blanchir le linge. Avant la construction du lavoir, les femmes du village étaient contraintes de descendre laver leurs linges à l’Ardèche par temps de sécheresse.
  
Poursuivre le long du ruisseau est un parcours un peu particulier pour rejoindre le ravin du Bourboulet. Mais une fois passé le premier kilomètre, la nature reprend entièrement ses droits dans ce vallon. Le sentier tracé semble tellement fragile et éphémère face à la végétation envahissante. D’amples saules pleureurs et de hauts peupliers sont les sentinelles du ravin tandis que volant de fleur en fleur, les papillons sont nombreux. On traverse aussi des zones où les buis devaient être magnifiques, mais désormais ravagés par la chenille de la pyrale.
  
Rapidement on croise les ruines du premier moulin, celui de Touroulet. Son origine semble remonter au XVe siècle. Il appartenait alors au clergé. Il n’en reste aujourd’hui que des murs, mais on peut encore distinguer ses meules immobiles et inutiles désormais. Le pignon du moulin de la Blanchane se laisse deviner entre les arbres. Ensuite on traverse une dizaine de fois le ruisseau des Fonts, l’eau du ruisseau ne coule pas toujours en surface, se cachant sous les pierres de son étroit lit. Le troisième et dernier moulin est celui de Patroux. Il était le dernier en activité avec sa roue horizontale pour la production de farine et d’huile.
  
Une sévère remontée sur un mauvais chemin conduit en lisière du hameau de Patroux. De ce point, le retour à Saint-Remèze traverse le plateau, de lavandes en vignes. Le contraste est saisissant entre cette nature domestiquée et celle redevenue sauvage au cœur du ravin…

Longueur : 5,5 km
Temps : 2h
Difficulté : facile
Balisage : jaune et blanc / rouge et blanc
Topo-guide : fiche randonnée Saint-Remèze (circuit n°1)
Avertissement : bien suivre le descriptif de la fiche car le balisage au départ est un peu aléatoire.

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Un lieu incontournable : La grotte de Saint-Marcel-d’Ardèche, entre géologie et paléontologie
  

La grotte de Saint-Marcel-d’Ardèche est un patrimoine à découvrir, un patrimoine géologique mais aussi paléontologique avec les nouvelles recherches qui sont entreprises depuis deux ans, grâce à l’impulsion de la mairie du village consciente de l’intérêt et du potentiel du site. Tout d’abord, il faut savoir que sous nos pieds court le plus grand réseau souterrain d’Ardèche, le quatrième au niveau national, avec aujourd’hui 64 kilomètres cartographiés. Ce réseau s’étage sur 5 niveaux, 2 noyés car en-dessous du niveau de l’Ardèche jusqu’à moins 107 mètres, et 3 fossiles, anciennement creusés par la rivière. Ce qui fait la caractéristique de ce site c’est tout d’abord sa formation entre six et deux millions d’années par l’abaissement de la Méditerranée à cause de la fermeture du détroit de Gibraltar qui abaissa le lit de l’ensemble des cours d’eau l’alimentant. Ainsi les eaux d’infiltration creusèrent des galeries pour rejoindre le point bas de la rivière et quand le détroit s’ouvrit à nouveau, l’augmentation du niveau de l’eau permit le creusement des niveaux supérieurs de la grotte. Ensuite vint la phase de comblement par concrétion, il y a entre deux cent mille et cent mille ans.
  
Plusieurs entrées donnent accès à ce réseau, dont l’entrée artificielle creusée pour faciliter l’accès aux visiteurs. C’est en 1836 qu’un chasseur découvre l’entrée naturelle de la grotte à quelques dizaines de mètres au-dessus de la rivière, dissimulée par la végétation. Quatre ans plus tard sont organisées les premières visites. Plusieurs campagnes d’exploration se dérouleront jusqu’au classement de la grotte en 1934 au Patrimoine national naturel au titre de « site naturel de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque ». Il faut attendre 1988 pour que des aménagements soient entrepris dans la grotte dans le but d’une plus grande accessibilité à ses richesses naturelles.
  
Un nouvel atout patrimonial est aujourd’hui en cours d’étude et de mise en valeur : la présence des ours des cavernes et des Hommes. Les traces de griffes dans la roche sont nombreuses et l’occupation humaine est aujourd’hui attestée pour les époques Néandertal, entre moins quatre-vingt-dix mille et quarante-mille ans, et Néolithique ancien, entre moins cinq mille et mille ans. D’autres témoignages actuellement en cours d’étude restent à dater. Malheureusement de nombreuses traces du passé ont été détruites ou pillées pendant les premières décennies de l’exploitation de la grotte. Plusieurs spécialités sont à pied d’œuvre pour mieux connaître la grotte à travers une vingtaine d’axes de recherche : spéléologie, géomorphologie, archéologie, climatologie, biologie, planétologie, aérologie et paléontologie. Pour faciliter l’accueil des chercheurs, deux appartements leur sont disponibles dans le village. Ainsi, tout est mis en œuvre localement pour que la connaissance avance à grands pas à propos des grottes de Saint-Marcel, véritable laboratoire naturel.
  
Depuis ce printemps, de nouveaux aménagements, une muséographie et une scénographie plus immersive grâce à quatre scénarios offrent une visite haute en couleurs et en connaissances apportées pour montrer le site sous son aspect esthétique bien sûr mais surtout scientifique accessible à tous. Les 800 mètres visitables en aller-retour sont désormais le prétexte à une découverte plus amples. Dans l’avenir, un vaste espace de médiation scientifique devrait être bâti et aménagé à la surface pour une découverte encore plus complète et une accessibilité des personnes à mobilité réduite.
  

  • www.grotte-ardeche.com
  • 04 75 04 38 07
  
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lavande 003
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lavande 005
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vigne 001
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vigne 002
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La vigne et la lavande - Tous les sens en éveil
  

Il se dit que c’est aux alentours de Grasse, au bord de la Méditerranée que la culture de la lavande a pris racine en 1925. Très vite elle s’est répandue dans tout le sud de la France. Ici, sur le plateau de Saint-Remèze, c’est le lavandin qui illumine d’un bleu-violet intense le paysage. Le lavandin est une variété hydride née du croisement de deux variétés de lavande, l’aspic et la lavande fine. Il est plus rustique et plus productif en huile essentielle. La lavande Maillette est aussi cultivée, mais d’une façon plus anecdotique. C’est au moment de la cueillette et de la distillation dans les grands alambics en cuivre qu’il faut visiter le Musée de la lavande… Côtoyant les cultures de lavandin, la vigne occupe la plus grande place sur le plateau. Sur un sol argilo-calcaire, les différents cépages s’épanouissent sous le soleil estival, parfois trop chaud. Syrah, Grenache, Merlot, Carignan, Cinsault, Marsanne, Viognier, Aramon, Chardonnay ; tous ces noms chantent à nos oreilles et affolent nos papilles car les vins d’ici, appellation Côtes du Vivarais, sont un plaisir à déguster…
 

  • www.lamaisondelalavande.com
  
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La grotte Chauvet 2 - La transmission du patrimoine de l’humanité
  

La grotte Chauvet, du nom reconnu d’un des trois spéléologues à l’origine de sa découverte, apparut au monde le 18 décembre 1994. Depuis 21 500 ans, son porche d’entrée était éboulé en privant l’accès. Cette caractéristique géologique permit l’exceptionnelle conservation des plus anciennes peintures de l’Humanité datant de 36 000 ans. Bien sûr, il était hors de question d’ouvrir cette grotte à la visite, les peintures n’y auraient pas résisté. Alors fut décidé, après un long chemin de réflexion et de procédures, la création d’un espace de restitution, juste à côté des Gorges et non sur le site de la grotte originelle. Le bloc de la grotte Chauvet 2 se dresse au cœur d’un vaste site boisé. Il comprend l’espace de restitution, la galerie de l’Aurignacien, une exposition temporaire toujours de grande qualité artistique, le parc boisé et son belvédère. De quoi passer un bel après-midi autour de l’évocation de ce premier grand chef-d’œuvre de l’Humanité.
  

  • www.grottechauvet2ardeche.com

  

grotte chauvet 2 001
grotte chauvet 2 001
grotte chauvet 2 004
grotte chauvet 2 004

   

grotte chauvet 2 011
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grotte chauvet 2 007
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grotte chauvet 2 009
grotte chauvet 2 009
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belvédère sur les gorges 003
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belvédère sur les gorges 002
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belvédère sur les gorges 007
belvédère sur les gorges 007

Les belvédères sur les Gorges - Les balcons du vertige
  

Il existe deux façons d’admirer les gorges de l’Ardèche ; soit depuis le pied des falaises pour les plus sportifs à pied ou en canoë, soit au fil des belvédères aménagés et sécurisés le long de la route touristique. Serre de Tourre, Autridge, Gournier, La Madeleine, Les Templiers, La Maladrerie, Le Ranc Pointu et quelques autres, tous ces noms évoquent des paysages à couper le souffle, quand la rivière ne ressemble plus qu’à un mince filet d’eau tout en bas des hautes falaises et que la vue se perd à l’horizon sur la garrigue au sud en rive droite. Sur 24 kilomètres entre Vallon-Pont-d’Arc et Saint-Martin-d’Ardèche, la route sinueuse surplombe les méandres de l’Ardèche à souvent plus de deux cents mètres de hauteur.
  

  • www.gorges-ardeche-pontdarc.fr/les-belvederes-de-la-route-touristique-des-gorges-de-lardeche/
  
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Les genévriers de Phénicie… - Sous le règne de la persévérance
  

Accroché aux plus hautes falaises des gorges de l’Ardèche, un arbre étonnant s’épanouit : le genévrier de Phénicie. Sa croissance en milieu vertical est très lente et sa longévité remarquable, plus d’un millénaire pour les plus vieux ayant su tirer profit des conditions de vie extrêmes. Ce genévrier méditerranéen se trouve ici en limite septentrionale de son aire de répartition. Croître avec pour seul support une paroi rocheuse n’est pas chose aisée pour un arbre, aussi coriace soit-il. La température élevée contre le rocher, le manque d’eau et de sels minéraux, le manque de place pour le développement des racines et bien d’autres contraintes lui imposent de trouver des stratégies adaptées. Le plus dangereux pour le genévrier de Phénicie est sans doute l’éboulement des parois et les chutes de pierre pouvant déraciner l’arbre. C’est ainsi que certains spécimens ont pu être étudiés et datés précisément quand les chercheurs les ont trouvés au pied des falaises.

  • www.ardeche-botanique.com/27-genevriers-phenicie-falaises.html
  
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Texte : Bruno Auboiron
Clichés : Bruno Auboiron, Droits Réservés, Collection Grotte de St-Marcel-d'Ardèche