Le château des Roure

Article paru en juillet 2024
Mis en ligne en juillet 2024

Du Moyen Âge à la sériciculture

Surveillant la route qui rejoint le Pont-d’Arc, à l’époque le seul point de passage sur l’Ardèche, se dressait une imposante tour carrée bâtie au XIe siècle et dont il ne reste rien à part peut-être un pan de mur. Le château ouvert à la visite date du XIVe siècle avec ses défenses reconstruites en 2016. « Cette restauration était le rêve de mon père, sourit Émilie Lascombe. Et il l’a fait ! Il n’avait pas beaucoup d’informations sur le château car toutes les archives ont été détruites à la Révolution. »
 
Conserver et transmettre la tradition
La visite du château des Roure se décline au long de 3 thèmes : la vie au Moyen Âge, les guerres de religions et la sériciculture ou l’élevage des vers à soie. Il s’agit là d’un assemblage qui peut paraître curieux au premier abord, mais ces trois thèmes sont l’identité même du château. Il faut savoir que pendant la période faste du ver à soie, ce château était l’une des plus grandes magnaneries de la région ; l’ensemble du deuxième étage du château était consacré à l’élevage des vers à soie pour obtenir une grande quantité de cocons. Au pied du château, un verger de mûriers plusieurs fois centenaires permettait de nourrir les vers. C’est ce qu’on découvre au premier étage dans la salle où sont exposés quelques vers à soie que Danielle, la mère d’Émilie, soigne quotidiennement : « Notre famille a vécu du ver à soie jusqu’à la génération des arrières grands-parents de notre fille. Aujourd’hui nous faisons perdurer la tradition pour la montrer aux visiteurs. Le ver à soie est vorace, entre l’œuf et le ver prêt à s’enrouler dans son cocon de fil, il prend dix mille fois son poids. Et à cause de la pollution de l’air, nous sommes obligés de laver les feuilles qui servent de nourriture désormais. »
 
Quelques pas de plus et on pénètre dans la grande salle d’apparat et sa vaste cheminée. Là  sont racontées l’histoire des guerres de religion et celle du comte du Roure. Encore une porte et c’est la chambre où le duc de Rohan passa une nuit, en visite dans la région… Un escalier à vis relie les différents niveaux et galeries extérieures du château.
 
Forge et trébuchets
Une salle au second niveau offre une sélection de photographies avant et après les travaux, où comment le bâtiment est passé de maison forte à château retrouvé. Une pièce sur la soie, une autre sur l’éducation des enfants de châtelains au Moyen Âge et nous voilà devant une curieuse vitrine où sont rassemblés divers témoignages découverts tout autour et dans le château. « Tout ce qui se trouve ici a été étudié par Christophe Delbecq, un ami de la famille, précise Émilie. Il n’y a rien d’extraordinaire, des balles de mousquets, des pièces de monnaie de toutes les époques, des fermoirs, bref des petits objets du quotidien nous rappelant les siècles passés. »
Après un long moment à admirer la vue et l’ambiance sur le chemin de ronde, il est temps de descendre dans un réduit près de l’accueil. C’est là que le père d’Émilie décida de creuser pour essayer de trouver le départ du souterrain du château. Tentative infructueuse, alors il eut l’idée de créer l’animation du fantôme des oubliettes : tout un programme !
 
Enfin, la dépendance avec les machines restaurées d’une filature d’Antraigues-sur-Volane et le parc composé d’animations autour des deux trébuchets et de la forge complètent agréablement la visite du château. Et peut-être même qu’à la forge vous serez désigné comme assistant pour actionner les deux gros soufflets et que vous repartirez avec en souvenir une broche ou une lame de couteau forgée.
 
 

Le Village à Labastide-de-Virac
04 75 38 61 13
www.chateaudesroure.com
 
En été le château est ouvert tous les jours de 10h à 19h, avec départ des visites toutes les 15 minutes.
En parallèle de la visite libre avec le soutien de la vidéo et des bandes audio en quatre langues, de nombreuses animations ponctuent la journée passée au Château des Roure : la forge, le petit et le grand trébuchets, le fantôme des oubliettes…

à côté

 
Musique dans les arbres
Entre Salavas et Labastide-de-Virac, sur la commune de Vagnas, le Bois des Musiciens est un lieu unique. 40 cabanes perchées dans les chênes d’une forêt aérée sont reliées entre elles par un réseau de filets. Tout au long de ce parcours dans les airs, 45 instruments de musique atypiques permettent aux visiteurs de tenter de rivaliser avec les oiseaux chantant à la cime des arbres. Chacun peut ainsi donner libre cours à sa créativité car la musique est un langage universel où tout est permis pour une expérience physique, sensorielle et culturelle.
indy-parc.com/le-bois-des-musiciens/

Barjac chante !
Une fois n’est pas coutume, alors franchissons allègrement la frontière ardécho-gardoise pour rejoindre la magnifique petite cité de Barjac et son festival de la chanson française, « Barjac m’en chante », qui se déroule chaque année fin juillet et début août. Un rendez-vous incontournable pour ceux qui aiment les mots, la poésie et la musique mélodique.
Barjac c’est aussi une cité où histoire et patrimoine riment au seuil des Cévennes entre les gorges de la Cèze et celles de l’Ardèche.
barjacmenchante.org/
château des roure chemin de ronde 002
château des roure chemin de ronde 002
La plus belle pièce
 
« Je ne me lasse jamais de cette vue qui est différente à chaque fois que j’y monte. » L’aveu d’Émilie se comprend. Il suffit de prendre pied sur le chemin de ronde aux tours, au mâchicoulis et aux échauguettes restaurés pour s’en convaincre. La vue s’échappe loin vers l’horizon des Cévennes et du rocher de Sampzon. On devine les gorges de l’Ardèche au nord, tandis qu’au sud les toits du village forment une nappe de terre cuite. Le verger des mûriers et le parc avec les trébuchets, tout en bas, grouillent d’animation. Mais ici, au sommet du donjon enfin accessible, seul le vent nous parle.
Le Duc de Rohan
 
Au début du XVIIe siècle, les guerres de religions, opposant les catholiques aux protestants font rage. Le château des Roure devient une place forte, le comte du Roure ayant adopté la religion réformée. En 1628, le duc de Rohan, l’un des chefs de rébellion huguenote, passa une nuit au château des Roure. Une chambre est consacrée à ce personnage ayant marqué l’Histoire de France et une lettre de sa main y est exposée. Mais est-ce bien dans cette pièce qu’il passa la nuit ? Un an plus tard, Louis XIII et Richelieu, victorieux, firent raser les remparts du village et les tours, le donjon, les échauguettes et le mâchicoulis du château qui se métamorphosa en simple maison forte. Ce n’est que récemment, avec la reconstruction des éléments de défense selon des plans définis par des architectes après étude des châteaux des alentours, qu’il reprit son allure initiale.
château des roure émilie lascombe 004
château des roure émilie lascombe 004
Trois questions à Emilie Lascombe
 
Qui êtes-vous ?
Je suis la fille des propriétaires du château qui est dans la famille depuis huit générations, c’est-à-dire juste après la Révolution. Le comte du Roure possédait plusieurs châteaux dans la région et il a vendu celui-ci à son métayer qui était notre ancêtre. On ne connait pas la raison de cette vente.

Que représente le château pour vous ?
J’ai grandi ici et j’y suis très attachée. Mes grands-parents, Ginette et Michel Lascombe, vivent encore dans une petite partie du château et mes parents, Danielle et Jean-Louis, dans les dépendances. La passation de la gestion du site se réalise doucement entre mes parents et moi, et même si cela me stresse, j’en suis heureuse.

Comment votre château est passé de lieu de résidence à site visitable ?
C’est une idée de mes grands-parents en 1975. Mon grand-père était agriculteur et ma grand-mère enseignante. Comme elle ne travaillait pas en été, ils décidèrent de nettoyer le premier étage pour l’ouvrir à la visite. Entre 2013 et 2016, tout le château fut restauré et on accède même au deuxième étage. Aujourd’hui on accueille quarante-cinq mille visiteurs par an.
Clichés : Bruno Auboiron