IV) DE RUOMS À VALLON-PONT-D’ARC

Article paru en juillet 2025
Mis en ligne en juillet 2025

Les prémices des Gorges

Depuis longtemps l’Homme a laissé des traces de son passage en ces lieux. Les vestiges des deux églises de la Gleizasse à Salavas en sont le meilleur témoignage. Le vieux village de Ruoms, derrière sa façade touristique, offre une immersion dans le passé des rives de l’Ardèche, tout comme l’itinéraire de la balade flirtant avec la nécropole mégalithique du Ranc de Figère. En prenant de la hauteur depuis le point de vue du village de Sampzon, dominé par son rocher à la forme peu habituelle, le regard se perd sur la rivière qui va bientôt rejoindre les Gorges. Mais avant un petit tour par la Font Vive et le Chastelas à Grospierres où l’Homme et la nature ont façonné le pied du relief. Et pour terminer, quelques tours de roue sur la voie verte traversant tout ce territoire en empruntant le tracé d’une ancienne voie ferrée.

Une petite randonnée : Le sentier des dolmens du Ranc de Figère
  

Le territoire calcaire de Labeaume compte près de 140 dolmens. Il s’agit de la plus forte concentration de dolmens en Ardèche mais aussi en France. Ainsi, cette petite randonnée au départ du village à la sortie de ses Gorges offre une découverte unique d’un patrimoine exceptionnel, que même les Bretons nous envient ! Bien sûr, malgré les études en cours, on ne sait pas si tous ces dolmens sont contemporains les uns des autres et de nombreuses questions restent sans réponse à propos de leur occupation, des personnes qui y avaient accès et des raisons de leur présence. Les fouilles ne livrent que peu d’informations et nombre de ces chambres funéraires datant du Néolithique, parfois réutilisées au Moyen Âge, furent pillées au fil du temps.
  
Avant d’admirer les dolmens du Ranc de Figère il faut tout d’abord gravir la pente montant sur le plateau calcaire. L’environnement du Sud s’affiche fièrement ici. Des dalles de pierres remplacent la terre et la végétation a bien du mérite d’arriver à se frayer une place dans cet univers minéral. Et bien vite apparaissent entre les arbres les silhouettes caractéristiques des premiers dolmens.
  
Cette chambre funéraire, constituée d’imposantes dalles dressées verticalement et horizontalement, était utilisée sur le long terme. Un système d’accès permettait d’y entreposer les morts au fur et à mesure. On y a retrouvé des ossements de femmes et d’hommes, d’enfants et d’adultes. On a découvert plus de cent morts dans certains dolmens. Souvent, les ossements plus anciens étaient poussés le long des dalles pour faire de la place aux nouveaux arrivants simplement déposés sur le sol avec des objets du quotidien, tels que des outils, des parures, des armes, des poteries… Ces sépultures étaient entièrement recouvertes par un tumulus, c’est-à-dire un imposant monticule de pierres cachant à la vue la structure en dalles du monument funéraire. Au fil des siècles, ces pierres furent, sans doute dans certains cas, réemployées à la construction de murets séparant les propriétés.
  
Un dolmen de Ranc de Figère fut entièrement restauré par l’association « Dolmens et patrimoine de Labeaume ». Sa chambre funéraire était effondrée depuis la fin du XIXe siècle et en 2009 il retrouva son aspect d’origine, sauf son tumulus et son système d’accès et de fermeture qui avaient disparu et qui n’ont pu être restaurés faute d’informations. Au fil du sentier, après les dolmens, c’est toute la richesse végétale et minérale du plateau qui se dévoilent, au son mélodieux des cigales.

Longueur : 6 km
Temps : 2h30
Difficulté : facile
Balisage : jaune et blanc
Topo-guide : Ardèche, terre de dolmens, sentiers découverte
Avertissement : le parking à l’entrée du village de Labeaume est malheureusement payant en période touristique ! Il existe une variante un peu plus longue de cette petite randonnée (9 km / 3h30)

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Un lieu incontournable : Les chapelles disparues de la Gleizasse à Salavas
  

En arrivant aux abords du site protégé des chapelles de la Gleizasse, la vue est magnifique sur le village de Salavas. Puis le regard se tourne vers les ruines. Il est fort émouvant d’imaginer qu’ici, il y a tant de siècles, des femmes et des hommes ont prié et ont cru en cette religion naissance qu’était de christianisme.
  
Côte à côte, ce ne sont pas deux chapelles mais trois dont les ruines dévoilent le tracé au sol ; deux avec leur petite nef et la troisième en carré en surplomb. Érigées sans doute au XIIe siècle, ces modestes édifices religieux prirent la place d’églises paléochrétiennes des IVe et Ve siècles, elles-mêmes bâties sur les fondations d’une construction païenne, temple ou mausolée présent dès le IIe ou IIIe siècle. Ces deux chapelles, dont nous admirons les ruines, furent détruites par les troupes protestantes en 1562 et vingt années plus tard leurs pierres furent réemployées pour renforcer les défenses du château de Salavas. Tout autour des chapelles, de nombreuses sépultures furent creusées et le site servit de cimetière jusqu’au XIXe siècle. Mais un siècle plus tard la présence de ces deux chapelles et du cimetière était tombée dans l’oubli.
  
Il fallut attendre les fouilles entreprises pendant dix ans entre 1978 et 1988 pour retrouver ces chapelles. Ces fouilles furent menées par Robert Helmling, qui le premier avait signalé l'existence du site, et le docteur Maurice Laforgue et les membres de la Société d'Études et de Recherches Archéologiques de Vagnas. La première chapelle, d’une longueur d’une quinzaine de mètres sur un peu moins de huit en largeur, est dédiée à Saint-Julien et la deuxième, dédiée à Saint-Jean, mesure un peu plus de treize mètres en longueur et un peu plus de six en largeur. Quant à la troisième, petit carré en surplomb de la première et accolée à son mur nord, elle date seulement du XVe siècle et est dédiée à Sainte-Anne. Il est bien difficile de s’imaginer leur allure au temps de leur splendeur, mais une maquette à la mairie du village permet de les visualiser, ainsi que les dessins sur le site.
  
Hormis les contours des chapelles, dans celle de Saint-Jean on peut admirer le support des fonts baptismaux, les vestiges d’une élévation du XVe siècle et à un angle une pierre épigraphe de l’époque gallo-romaine du IIe siècle. Dans celle de Saint-Julien, la plus grande, les fondations d’un premier édifice, un sarcophage mérovingien du Ve ou VIe siècle et le pilier de la chapelle paléochrétienne de la même époque… Lors de la décennie de fouilles furent dégagés d’autres sarcophages, un couvercle orné d’une rosace à six pétales, des poteries, des épingles, des monnaies et des bijoux de toutes les époques. Il fut même retrouvé la ferrure d’un bourdon, et une coquille Saint-Jacques ; ces deux objets appartenaient-ils à un pèlerin de passage ? Nous ne le saurons jamais, mais ce ne sont pas moins de deux cent cinquante sépultures, du Ve au XIXe siècle qui purent ainsi être étudiées par les archéologues.
  
Il faut prendre le temps de s’asseoir sur le banc ombragé à l’entrée du site et rêver au défilé de la vie intense qui anima ce lieu au fil des siècles. L’oubli est une bien triste affaire, fort heureusement, même si elles ne peuvent parler, les pierres des chapelles du site de la Gleizasse nous racontent une belle histoire de près de deux mille ans !
  

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point de vue sampzon 005
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point de vue sampzon 008
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point de vue sampzon 004
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Le point de vue du village de Sampzon - Voir plus loin
  

Dominé par son rocher caractéristique en forme de table inclinée, le village de Sampzon offre un point de vue magnifique sur la rivière Ardèche à 381 mètres d’altitude. Ce village a connu son heure de gloire aux IXe et Xe siècles quand il était une place plus importante que Ruoms et toutes les paroisses des alentours. Un château était alors construit au sommet du rocher, position hautement stratégique. Sa destruction fut ordonnée en 1602, pendant les guerres de Religion. Ainsi cette période faste ne dura pas, et cinq siècles plus tard le bourg perché ne compte plus qu’une poignée d’habitants. Légèrement en contrebas du village, une table d’orientation permet de se repérer dans le vaste paysage offert au regard.
  

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Le Chastelas et la résurgence de la Font Vive à Grospierres - De l’eau à la pierre
  

Deux sites, l’un naturel, l’autre bâti de la main de l’Homme, sont rassemblés sur un petit espace à Grospierres : la source de la Font Vive et les ruines du Chastelas. La première est un havre de paix entouré d’arbres. La Font Vive est une résurgence s’étalant dans un bassin aux eaux limpides et turquoises. Sa profondeur et sa surface varient en fonction de la saison et des épisodes pluvieux. Il est absolument interdit de s’y baigner, le site est protégé. De toute façon l’eau est d’une température constante ne dépassant pas les douze degrés, même au plus fort de l’été. Les abords de la Font Vive sont comme une oasis de fraîcheur dans la chaleur estivale. Le site fut exploré pour la première fois en 1974, puis quelques années plus tard des spéléologues découvrirent un vaste réseau souterrain alimentant la résurgence. Malgré une dernière plongée en 2002, la Font Vive conserve encore bien des mystères.
  

castelet 001
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grospierres depuis castelet 001
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Les richesses de Ruoms - Au fil des siècles
  

Derrière les remparts de la vieille ville, encore visibles en partie aujourd’hui, s’étalent les richesses patrimoniales de Ruoms. Parmi elles, discrètes, la petite chapelle Notre-Dame-des-Pommiers ne se découvre qu’après avoir traversé un sombre passage ou contourné l’église. Ce modeste édifice date sans doute de l’époque carolingienne. Son architecture romane que magnifie le calcaire tendre de sa façade sculptée et son décor du XIe siècle précèdent l’accès au cloître de l’ancien monastère de Ruoms. Tout à côté l’église Saint-Pierre-aux-Liens, des XIe et XIIe siècles, se dresse fièrement tandis qu’à ses pieds des fouilles permirent de mettre à jour des vestiges d’inhumations antérieures au XIe siècle, les restes du cimetière médiéval, et les vestiges d’un ensemble thermal datant de l’Antiquité. Quant aux remparts, ils furent édifiés au XIVe siècle pour protéger la cité et ses habitants des ravages de la guerre de Cent Ans. Des sept tours rondes ponctuant l’enceinte carrée, il n’en reste que six aujourd’hui et deux portes d’accès. Et puis, au fil des rues s’affichent les belles façades des maisons des siècles passés.
  

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La voie verte - Après le train, le vélo
  
Sur plus de 50 kilomètres, la Via Ardèche est une voie verte qui reprend, sur son tronçon sud, le tracé de l’ancienne voie ferrée menant à l’Étoile de Vogüé, carrefour ferroviaire important autrefois. L’itinéraire protégé de cette voie verte franchit maints viaducs et traverse quelques tunnels. Reliant Alès au Teil, cette ligne permettait au charbon cévenol de gagner la vallée du Rhône. Sa création date de 1857. Elle fut peu à peu fermée au trafic des voyageurs et un peu plus tard à celui des marchandises dans les années quatre-vingt. Le déclassement suivit rapidement, ce qui permit l’aménagement de cette ligne en voie verte pour le plus grand plaisir des cyclistes et autres adeptes de la mobilité douce pour relier Lalevade aux limites du Gard avec des embranchements vers Vallon-Pont-d’Arc et Largentière en cours de réalisation.
  

  • www.via-ardeche.fr
  
voie verte ruoms 001
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voie verte ruoms 004
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Texte et clichés : Bruno Auboiron