Omer Arrijs

Article paru en février 2017
Mis en ligne en septembre 2022

La nature pour fil conducteur, mais ne dédaignant pas se pencher sur ses congénères, le travail du photographe
Omer Arrijs est d’une sensibilité hors normes. De la garrigue au massif du Tanargue,
il arpente les pentes et les pierres pour saisir la vie en minuscule…
 

Dans une annexe de l’ancienne école de Chapias, ancien village au milieu du plateau des Gras devenu hameau de Labeaume, Omer Arrijs nous accueille avec un large sourire bonhomme. Il est photographe, et quel photographe ! Ce qui le fait vibrer, c’est la nature et c’est tout naturellement qu’il s’est installé là où elle règne en maître. Depuis la terrasse de sa toute petite maison, il s’extasie quotidiennement de la vue dont il jouit, qui l’emmène jusque sur le massif du Tanargue au loin, là-bas.

A l’heure de la retraite de linguiste et d’animateur socio-culturel qu’il fut autour du langage, pendant plus de trente ans, il quitta sa Belgique natale. « Je suis parti il y a six ans. Je ressentais l’impérieux besoin de redevenir moi-même, loin de l’action. Je voulais faire le vide et me retrouver enfin seul. Faire ce dont j’avais réellement besoin fut un soulagement.» Il arriva alors en Ardèche pour le soleil, la nature et le silence. « Ce silence sur le Gras, je le déguste comme un cadeau, sourit-il de son délicat accent. » Il n’est pas exagéré d’affirmer que l’aridité et les pierres du pays l’ont totalement séduit. Il vit là, heureux.

Avouant qu’il n’était pas à la hauteur, un pinceau à la main, il troqua les tubes de couleurs contre un appareil photo. Il apprit avec acharnement la technique à force de tests et d’essais, sur le tas. Aujourd’hui profondeur de champs et vitesse d’obturation n’ont plus de secrets pour lui. Il estime même qu’en terme de composition de l’image, son expérience picturale lui a grandement servi. Omer aurait pu vivre de contemplation, mais il se pencha au plus près de la garrigue et y découvrit une fantastique vie en miniature. « À partir de l’été 2013, j’allais tous les matins me promener et faire des photos pendant deux heures. Bien sûr je prends en photo les pierres, les arbres, les broussailles et tant d’autres choses qui alimenteront les thèmes de mes futures expositions. Tout est tellement lié dans ce milieu qu’au milieu de tout cela j’ai rencontré les insectes. » Car Omer n’a pas seulement photographié les insectes, il les a rencontrés. Il ressent un échange avec eux, de la peur au début, puis souvent de la curiosité face à son calme. « Je me suis toujours demandé ce que l’insecte percevait de moi. Mes photos sont la traduction de mon émotion lors de ces rencontres avec ces petits êtres tellement vivants. »

Omer n’est pas un naturaliste, il est un homme photographe passionné par la beauté, la présence et le mystère de ce petit peuple de la nature. « En regardant certaines photos d’insectes, je me rends compte que je peux aller beaucoup plus loin dans le rendu de ce mystère. Je veux m’éloigner de l’aspect descriptif pour aller vers la poésie. Mais je garde à l’esprit que mes photos doivent rester compréhensibles, qu’elles doivent offrir une porte d’entrée. » Omer a voulu montrer ses photos et insiste sur la nécessité de ne jamais s’arrêter à la première impression : « j’aime ou je n’aime pas ». Prendre son temps pour regarder une image, la faire parler, découvrir ce qu’elle cache parfois.
Dès sa première exposition en 2015 à Labeaume, il connut le succès et surtout un début de reconnaissance. Il en avait besoin après ces premières années assez solitaires. « Je suis de moins en moins ermite et je tisse de belles relations humaines, affirme-t-il. Mon immersion totale dans la nature m’a nettoyé l’esprit et m’offre un beau et nouveau rapport à la matière. » Ainsi, sans pour autant délaisser les insectes, il travaille à une prochaine exposition à Labeaume en mai 2017 sur le thème des arbres et des pierres. Cela ne l’empêche pas non plus de figer l’image de femmes et d’hommes… Il réalise en ce moment un intéressant travail en collaboration avec les habitants de Saint-André-Lachamp. « Dans tout ce que je fais, je travaille la qualité de l’image, une attitude, une expression, une situation et toujours en lumière naturelle. Je ne réalise jamais de photo souvenir, jamais. »

Cette exigence, il lui est aisé de l’analyser une fois la photo sur l’écran de son ordinateur, mais avant, en situation de prise de vue, c’est une autre histoire. Omer est un photographe de l’instinct. Bien sûr, sa maîtrise de la technique photographique lui ouvre toujours de nouveaux horizons, mais quand il appuie sur le déclencheur, c’est l’instinct qui se nourrit de ses connaissances et non l’inverse. De son propre aveu, être devenu photographe lui permet de vivre poétiquement. Mais il lui arrive aussi d’avoir besoin d’oublier volontairement son appareil photo et partir dans la nature en contemplatif. Un besoin de ressourcement. Voir plus large, au-delà de la lentille de l’objectif ! Mais bien vite il revient à son appareil photo et replonge son regard au plus près de la garrigue.
En savoir plus
Omer Arrijs
Chapias
07120 Labeaume
06 02 28 63 45
 www.ardeche-vive.com 
moer.arrijs@gmail.com
 
Texte : Bruno Auboiron
Clichés : Bruno Auboiron, Omer Arrijs