Compagnie Les Affamés

Article paru en avril 2017
Mis en ligne en septembre 2022

Rayonnant par ses ateliers sur le territoire du sud de notre département et nationalement par ses spectacles
et le jeu de ses acteurs, la compagnie « Les Affamés » lutte pour la diffusion d’un théâtre
qui donne à réfléchir en plus de divertir…
 

Pendant quinze ans, la compagnie « Les Affamés », sous la direction de Gilles Droulez, comédien et metteur en scène, a offert à la vie culturelle lyonnaise un spectacle par an. Celui-ci, bien sûr, était ensuite joué partout en France et même à l’étranger, avec un passage « obligé» par le festival d’Avignon, seul lieu de rassemblement des programmateurs de théâtre, en France. En 2011, la compagnie déménage, trop de concurrence à Lyon et un territoire était en demande, celui  l’Ardèche méridionale. « Nous avons été merveilleusement accueillis à Saint-Paul-le-Jeune où nous avons installé notre siège artistique, explique Gilles Droulez. Avec ma venue ici, je n’ai rien modifié au théâtre qui m’est précieux, il est toujours poétique, engagé et créatif. Je me sentais un peu à l’étroit à Lyon et je cherchais un vaste lieu pour organiser des résidences d’artistes. Je n’ai pas trouvé un lieu, mais un territoire et des communes très intéressées et accueillantes.»

Si le théâtre engagé reste l’identité de cette compagnie, son nouveau territoire d’adoption lui a offert la possibilité de développer la transmission et le partage avec les habitants. Bien sûr cela se réalisait lors des résidences et des spectacles, mais surtout à travers les ateliers ouverts à Saint-Paul-le-Jeune, Joyeuse, Largentière et Aubenas. Que ce soit, les enfants, les ados ou les adultes, tous sont toujours nombreux à découvrir le théâtre et à se perfectionner aussi auprès des comédiens professionnels de la compagnie. « Dans ces ateliers on rencontre l’humain, se réjouit Gilles, et c’est vraiment régénérant. Les gens, les jeunes en particulier, s’ouvrent et se livrent grâce au théâtre. On croise des personnes venant de tous horizons social et culturel qui tendent souvent vers un projet commun. Bien sûr il s’agit là de théâtre amateur, mais l’engagement de l’acteur sur scène doit être sincère pour, à la fin de chaque année, présenter une pièce et se confronter au regard du public. » Gilles est un passionné, un brin rebelle. Pour lui, point de théâtre sans profondeur ; l’amusement ne suffit pas. Cet engagement de l’acteur sur scène est l’essence même de son art. L’acteur doit avoir conscience de ce qu’il est en train de défendre en jouant, son engagement envers l’amour, l’être humain, une certaine forme de résistance au quotidien. Un message, un chemin sur lequel Gilles veut entraîner les spectateurs des spectacles de la compagnie.

Passion et engagement ont donc déterminé et déterminent toujours la programmation de la compagnie avec des auteurs contemporains comme Éric-Emmanuel Schmitt, Harold Pinter, Amélie Nothomb, Suzanne Lebeau et des auteurs classiques tels que Diderot, Dostoïveski, Marivaux, Tchekhov. Théâtre mais aussi chanson avec Léo Ferré et Barbara, et poésies avec Rimbaud, Aragon, Baudelaire… En lisant ces illustres noms, on pourrait aisément imaginer que la compagnie « Les Affamés » est un théâtre élitiste. Il n’en est rien. « Bien sûr, le divertissement est très à la mode et le vaudeville séduit, reconnaît Gilles. Nous le laissons aux nombreuses troupes amateurs, nous souhaitons proposer autre chose, un théâtre où on rit aussi parfois, mais où on réfléchit, un théâtre qui fait rêver, un théâtre pour tous. » Fanny Corbasson, comédienne, désormais pilier de la compagnie avec Gilles Droulez, a retrouvé grâce à ce théâtre son envie de jouer et affirme : « Certes les spectacles sont engagés, mais ils restent véritablement accessibles. Il s’agit d’un théâtre évoluant dans une certaine simplicité, qui se veut proche des gens et qui l’est. »

Malheureusement avec la restriction significative des budgets dédiés à la culture, vivre du théâtre est de plus en plus difficile. L’aide à la création et à la diffusion disparaît, alors chaque compagnie professionnelle prend de plus en plus de risque, en assurant elle-même la production, la promotion et la diffusion de ses spectacles. Le comédien devient vendeur de son art et consacre donc moins de temps à la création. Cette évolution pose question. « Dans une compagnie désormais, le plus difficile n’est pas de jouer, mais de se vendre, regrette Gilles. Si nous avions les moyens financiers, nous pourrions plus nous consacrer à la création. Mais je ne suis ni pessimiste, ni aigri, juste lucide, et le théâtre est notre passion, nous continuerons toujours, nous trouverons des solutions pour créer et aussi transmettre. »
En savoir plus
Compagnie Les Affamés
Espace culturel Brahic
07460 Saint-Paul-le-Jeune
com07@cielesaffames.com
www.cielesaffames.com
 
Texte et clichés : Bruno Auboiron