Arthur Rimbaud

Un don précoce d'écriture...
Élève brillant, un latiniste doué, Arthur Rimbaud, écrit de façon mature dès l'âge de quinze ans. Novateur, il brise l'ordre établi des poèmes en rimes. Poète par excellence, sensible, fugueur, rebelle, rejetant la médiocrité bourgeoise et son hypocrisie, et la religiosité. Il est l'auteur de célèbres textes, entre autres : Les étrennes des orphelins (1869), Le Bateau ivre (1869) et Le Dormeur du Val (octobre 1870). Certains poèmes comportent plus de 100 vers comme Soleil et chair, Le forgeron et d'autres seulement 8 vers comme Sensation. Un vocabulaire riche doux ou violent, une observation fine du monde, l'expression précise de sentiments, parfois un jugement irrévocable et sans merci de la société, dénonçant l'inutilité et l'atrocité de la guerre, la misère,...

Des expériences extrasensorielles... Il expérimente diverses substances illicites, des paradis artificiels, pour être ce qu'il se sent : voyant. "Le poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens"(Lettre du voyant 1871). Ecrire en laissant l'inconscient guider la main. On retrouve cette quête d'absolue irréalité, de surnaturel dans Une Saison en Enfer (1873) dont le pathétique domine : "Jadis, si je me souviens bien, ma vie était un festin où s'ouvraient tous les coeurs,où tous les vins coulaient. Un soir, j'ai assis la Beauté sur mes genoux -Et je l'ai trouvée amère - Et je l'ai injuriée." Extrait de Nuit de l'enfer : "Je suis esclave de mon baptême. Parents, vous avez fait mon malheur et vous avez fait le vôtre. Pauvre innocent ! L'enfer ne peut attaquer les païens".

Ambitions littéraires et amitiés...
Désireux d'être reconnu, publié, ambitieux de gloire parisienne, il fait plusieurs tentatives d'intégration dans des groupes littéraires tels le Cercle Zutique au Quartier Latin, le Club Les Vilains Bonhommes créé par les parnassiens. Il en est évincé en raison de son insolence, son arrogance. Il fréquente un milieu intellectuel, noue des amitiés comme avec Jean-Louis Forain (futur grand caricaturiste), EtienneCarjat,... mais se brouille fréquemment, toujours à cause de son caractère emporté, provocateur.
 
Amours tumultueuses et contrariées...
Les poèmes, textes de Rimbaud furent accueillis avec enthousiasme par certains autres écrivains comme Paul Verlaine (1844-1896). Ce dernier fut également séduit par leur auteur ! Il l'invite à Paris. Tous deux furent amants alors que Verlaine était marié. Liaison houleuse : Verlaine se lamente de tout, Rimbaud est sarcastique. Relation dont on retient essentiellement l'issue détonante : coup de pistolet tiré par Verlaine sur Rimbaud le 8 juillet 1873 à Bruxelles. Verlaine fut condamné à deux ans de prison et
emprisonné à Mons. On prête aussi à Rimbaud une relation avec Germain Nouveau (1851-1920). Ils ont séjourné ensemble à Londres en mars 1874 et Rimbaud a sombré dans une immense tristesse lorsque Germain Nouveau est rentré seul à Paris.

D'autres horizons...
Très tôt il renonce à la poésie, avant ses vingt ans. C'est alors qu'il devient le voyageur dont il a rêvé. Rimbaud bohème, vagabond, ce n'est pas un cliché. C'est un marcheur infatigable, il va de Bruxelles à Rotterdam, s'engage comme mercenaire dans l'armée coloniale hollandaise. Désertion à Java et retour en France. Puis il repart. Parcourt le monde comme pour fuir sa vie. Fuit son enfance surtout : une éducation rigoureuse gérée par sa mère très pieuse, l'absence d'un père militaire haut gradé. Il a besoin d'espace, de nouvelles expériences. Cologne, Brême, Stockholm, Copenhague, Rome, Alexandrie, Chypre. Il y est embauché dans une entreprise française de Larnaca, maison Ernest Jean et Thial fils comme chef de chantier. De 1880 à 1891, en Arabie, en Abyssinie (Ethiopie), il vit de commerce (café, peaux, ivoire,...), s'intéresse à la photo, étudie la géographie et s'adonne au trafic, celui des armes notamment. La sympathie pour lui retombe. Il vit avec une Abyssine, l'instruit, envisage de l'épouser. N'en fera rien. Des déconvenues, financières, commerciales. Un climat géopolitique tendu. Mais aussi des douleurs physiques. Il souffre de rhumatismes, du genou droit, une tumeur est diagnostiquée. En février 1891 il vend ses affaires, part pour Marseille où il sera opéré à l'hôpital La Conception. Amputation de sa jambe. Il revient à la Roche où sa soeur, Isabelle (1860-1917), le soigne avec dévouement. Le climat est rude. Son état s'aggrave. Hospitalisé à nouveau, il meurt le 10 novembre 1891.

De lui, à retenir...
Pour son œuvre, c'est la prolifique correspondance, notamment avec sa mère à qui il réclamait souvent de l'argent, sa soeur et d'autres personnes comme Georges Izambard (1848-1931), Alfred Ilg (1854-1916)qui permet de suivre ses voyages, activités, de mieux le cerner. Mais qui peut prétendre connaître ce jeune homme dont la courte vie (37 ans) a été jalonnée d'aventures en tous domaines, d'amitiés fidèles (avec Ernest Delahaye (1853-1930), ami d'enfance, Paul Demeny (1844-1918), poète, destinataire de la Lettre du Voyant en 1871,...) ou non, d'écriture si précocement intelligente ? Et où est la part de vérité alors que sa famille, en l'occurrence sa soeur Isabelle et le mari de celle-ci, Pierre Dufour alias Paterne Perrichon (1855-1922), ont largement alimenté le "mythe Rimbaud" lissant à souhait son portrait. Ils sont allés jusqu'à falsifier, occulter ou arranger certains faits ? Mais qu'importe. Arthur Rimbaud personnifie la soif de liberté dans un esprit rebelle. Il est celui dont on aurait aimé être l'ami(e) pour approcher l'excellence d'une intelligence et d'un talent poétique précoces, l’ambiguïté de sentiments dans sa tumultueuse expression, le courage du vagabondage dans la poursuite de commerces divers et surtout l'ultime volonté d'être totalement soi sans préoccupation de jugement aucun. Si la vie doit être courte qu'elle soit pleinement vécue. La pressentait-il ainsi ?...