Lônes et forêts alluviales

Article paru en juillet 2022
Mis en ligne en juillet 2022

Le Rhône sauvage et libre, du moins quand le fleuve l’était encore, ne coulait pas sagement 
entre deux rives bétonnées. Non, il s’étalait à loisirs en fonction de la montée de ses eaux, 
créant des bras et des plans d’eau plus ou moins éphémères, des îles temporaires 
au cœur de la forêt alluviale. 

Avec son aménagement dès la fin du XIXe siècle, marqué par l’édification du barrage de Miribel-Jonage juste en amont de Lyon en 1899, et la création de la Compagnie Nationale du Rhône en 1934 pour la production d’électricité, le Rhône fut irrémédiablement domestiqué et son cours ne vagabonde plus comme autrefois. Bon nombre de lônes et de zones humides a disparu et ce n’est que depuis quelques années que la réhabilitation de certains a débuté. 

Un refuge pour la biodiversité
Les lônes sont des anciens lits secondaires que le Rhône occupait suite à ses violentes crues. Ces lônes constituent un milieu naturel unique à l’aspect sauvage affirmé. Ils offrent une flore et une faune remarquables et remarquées par les amoureux de la nature. Ces bras en retrait du lit principal du fleuve servaient à réguler son débit et étaient alimentés en eau par les crues ou par infiltration. Disparues avec le creusement, les canaux de dérivation du fleuve, ces lônes restaurées accueillent aujourd’hui de nombreux oiseaux revenus en nombre comme le cygne, l’aigrette, le loriot, le martin-pêcheur ou le héron. Le castor a fait également son grand retour sur les bords du Rhône et sous la surface de l’eau, le brochet, la bouvière et l’épinoche. 
C’est à la tombée de la nuit ou encore mieux à l’aube que l’on peut entendre le mieux les chants des oiseaux et profiter de l’ambiance quelque peu « forêt tropicale » de la forêt alluviale autour de la lône de la Roussette à Viviers et sur les bords du Rhône. Au fil du chemin longeant le fleuve, on peut admirer la lutte du monde végétal pour s’élever vers la lumière. La vigne sauvage et la clématite partent à l’assaut des hauts peupliers noirs et blancs aux feuilles argentées. C’est aussi à ce moment de la journée que les bruits parasites de la circulation routière, la nationale n’est pas loin, se font les moins gênants. Et finalement, autant que la lône, c’est la forêt alluviale qui nous offre le plus beau spectacle.

La nature est libre
Rien n’est jamais définitif et la nature évolue à son rythme. Toutefois l’homme peut accélérer cette évolution et c’est sans aucun doute grâce à nous que la jussie, le bambou, la monnaie du pape et la renouée du Japon ont si vite envahi l’espace forestier et les bords de l’eau. Cette invasion prive les plantes endémiques de l’espace nécessaire et de la lumière pour se développer. Il est trop tard pour lutter efficacement, la nature sera toujours plus forte que l’homme et si ces plantes invasives ont trouvé là un environnement favorable à leur croissance, à n’en pas douter elles seront de plus en plus présentes. Et ce malgré l’arrêté préfectoral de protection de biotope dont bénéficie la lône de la Roussette, la rive droite du Rhône et le lit de son affluent l’Escoutay depuis l’an 2000. 
Le classement d’une trentaine d’hectares a permis de recenser les richesses naturelles de ce site : vingt-sept espèces d’arbres, vingt-cinq d’arbustes, vingt-deux de plantes aquatiques, quarante-trois d’herbacées, quatre-vingt d’oiseaux, dix-sept de poissons, dix-sept de mammifères, cinq d’amphibiens et six de reptiles ; sans compter les insectes et encore mille éléments du vivant dont peut-être certains que nous ne connaissons pas encore. Mais la lône de la Roussette n’est pas toujours en eau. Cette dernière va et vient, la nature est libre. 

S’Y RENDRE
Au rond-point à la sortie nord de Viviers, suivre la route du Teil et au lieu-dit Roussette (juste trois maisons au bord de la route), prendre à droite après les maisons pour descendre sur le parking.
A faire, à voir
Le centre historique de Viviers et sa cathédrale, l’écluse de Châteauneuf-sur-Rhône, le village de Saint-Montan, les lônes de Soyons…
Renseignements 
www.mairie-viviers.fr / www.ardeche-guide.com/lieux-de-visites/patrimoine-naturel/lone-de-la-roussette-191763
Pratique  
Visite libre, juste un panneau d’information au début de la lône, près du parking, et au début du chemin le long du Rhône.

Texte et clichés : Bruno Auboiron